Caen : Contre toutes les prisons, représailles contre les architectes du SAS

reçu par mail / mercredi 21 février 2024

En 2016, l’État français lance un plan de construction de nouvelles prisons, pour ajouter 15 000 places d’enfermement à celles déjà existantes. A ce plan s’ajoute le projet de construire 3 000 nouvelles places en Centre de Rétention Administrative d’ici 2027.

Ici, c’est à Ifs qu’un nouveau centre pénitentiaire a été construit, puis inauguré en octobre 2023. Le mois suivant, 306 prisonnier-es sont transféré-es dans la nuit et par surprise de l’ancienne maison d’arrêt de Caen jusqu’à la nouvelle taule, qui compte 551 places et les dernières merveilles du contrôle technologique, évidemment. A la fin de l’année dernière, un prisonnier mineur est mort à l’intérieur de ces murs flambant neufs.

Mais ce n’est pas tout. En décembre 2022, dans le cadre du même plan, une Structure d’Accompagnement vers la Sortie (SAS) de 90 places a aussi été inaugurée à Caen. Les SAS sont des prisons comme les autres, à ça près que le ministère de la Justice communique activement pour expliquer que ces enceintes entourées de hauts murs et de barbelés sont différentes puisque pensées comme des tremplins vers la sortie et la réinsertion. En vérité, les SAS sont des taules supplémentaires pour enfermer toujours plus de monde et maintenir en place l’ordre social.

Ces nouvelles prisons ne sortent pas de terre toutes seules. De la conception à la construction, il y a des responsables. Florent Schneider et son agence d’architecture en font partie. Sur le site de l’Agence Schneider, le projet du SAS de Caen est fièrement mis en avant*. Florent Schneider revient dans une interview** sur son expérience de collaborateur de la pénitentiaire et sur sa volonté de créer une prison meilleure : « c’est toujours complexe dans un projet comme ça qui est tiraillé entre des habitudes, la sécurité et l’innovation. Il y a toute une révolution culturelle à faire »… Visiblement, ça n’a pas été si complexe de construire une taule de plus, et la révolution culturelle a semble-t-il pris du plomb dans l’aile quand il a fallu encaisser un gros chèque de l’État !

Vous n’êtes que des sales collabos.
Votre communication pathétique et vos états d’âmes humanistes n’y changent rien.

En guise de représailles, dans la nuit du 20 février, on est allé-es au 42 avenue du Six Juin à Caen, là où l’agence Schneider a des bureaux***, dans un immeuble. On a recouvert de peinture l’interphone puis la plaque en verre « Agence Schneider ». En bas de l’immeuble, on a écrit « Contre toutes les prisons » parce que peu importe qu’elle soit sans miradors, axée sur la réinsertion ou ouvertes aux travailleuses et travailleurs sociaux, une prison reste une prison, c’est-à-dire un lieu dans lequel on enferme contre leur gré celles et ceux que l’État juge dangereux-ses pour ses intérêts. En partant, et parce qu’on a la haine de voir nos proches tué-es, enlevé-es, menacé-es par le système carcéral et ses sbires, on a laissé quelques fissures sur les vitres du hall de l’immeuble.

La prison c’est une torture, un outil d’exploitation capitaliste, une usine du contrôle qui ne résout pas les conflits et ne répare pas les torts causés, qui au contraire crée des traumatismes et de la misère, et qui surtout maintient la hiérarchie sociale en place. En France, des prisonnier-es meurent presque tous les jours, assassiné-es par les maton-es, poussé-es au suicide, maltraité-es, pas soigné-es, soumis-es à la camisole chimique… Beaucoup de détenu-es travaillent au service de multinationales contre une micro-rémunération honteuse dans l’espoir de voir leurs conditions de détention s’améliorer. Celles et ceux qui se rebellent sont condamné-es aux tortures physiques et psychologiques des quartiers d’isolement, puni-es par les coups des ERIS, et voient leurs peines prolongées. C’est grâce à ce système que des architectes comme Schneider font leur chiffre d’affaire.

Les violences et la menace pénitentiaires sont aussi un message envoyé par l’État à celles et ceux qui, à l’extérieur de ces murs, voudraient se rebeller contre sa domination. Il n’y aura donc pas de changement radical sans offensives concrètes contre l’idéologie carcérale, ses structures et ses responsables.

C’est ce qu’on veut exprimer par ce geste, ainsi que notre chaleureuse solidarité avec toutes celles et ceux qui se battent contre la taule, dedans comme dehors.

Une bombe de tag anarchiste et un brise-vitre marteau

 

* https://www.agence-schneider.fr/projets/centre-penitentiaire-de-caen-la-maladrerie-14/
**« Nouvelles prisons : fini la réinsertion, bonjour le tout-sécuritaire », 5 décembre 2023, streetpress : https://www.streetpress.com/sujet/1701785521-nouvelles-prisons-reinsertion-sas-virage-securitaire-dupond-moretti
*** Il y a aussi des bureaux de l’Agence Schneider à Lyon (18 rue Imbert Colomès)

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