Prison de Messine (Italie) : Kafka à la sauce messinoise

Malacoda / mardi 2 mars 2021

Il y a des phénomènes répressif où le côté comique dépasse le tragique.

Ces derniers jours, j’ai été protagoniste involontaire d’un de ces cas, l’un parmi les nombreux que la prison de Messine arrive à nous offrir, chaque jour.

Le 26 février 2021, la DDA [Direzione Distrettuale Antimafia – le Parquet anti-mafia de chaque tribunal italien ; NdAtt.] de Messine, via des émissaires de la DIGOS [la police politique ; NdAtt.] m’a fait signifier, en prison, un avis d’ouverture d’enquête pour l’article 270bis du Code pénal (association subversive avec finalité de terrorisme), dont je suis la seule inculpée et dont la victime serait l’État. L’enquête, dirigée par les Procureurs Vito Di Giorgio et Antonio Carchietti, a été ouverte parce que « un disque dur externe lui a été envoyé par la poste, à l’adresse de cette institution pénitentiaire. Nous pensons que le contenu de ce disque dur pourrait fournir des éléments utiles afin de faire ressortir des actes criminels accomplis par cet individu [Anna ; NdAtt.] ou afin de faire découvrir des nouvelles actions avec des finalités de terrorisme ou de subversion de l’ordre démocratique. Nous soulignons que, comme l’a indiqué la DIGOS de Messine, il est nécessaire de connaître le contenu de ce disque dur ».

Pour ajouter encore un peu de ridicule à tout ça, il y a le fait que ce disque dur n’est pas arrivé par un « courrier » dont la nature resterait à préciser (ce qui est impossible, comme il le sait quiconque connaisse un peu les modalités de réception, d’enregistrement et de contrôle du courrier, en prison) mais il était conservé dans le dépôt de la prison et il m’a suivi, à distance, pendant mes pèlerinages dans différentes taules, ces derniers 4 ans. Et il contient… simplement le dossier judiciaire du procès Scripta Manent.
Enfin, une accusation d’association subversive pour la détention du dossier judiciaire d’un procès pour association subversive. J’avais demandé qu’il soit donné à une personne qui était venue au parloir, comme cela peut être fait pour tout objet déposé au dépôt de la prison.

Avec cela, la DDA et la DIGOS de Messine ont, cette année, gagné le prix de l’utilisation la plus créative de la menace « associative »… étant donné que, dans ce cas, mes complices seraient les Procs de Turin qui ont écrit le dossier… ou les matons du dépôt qui le conservaient. Une tragi-comédie qui montre les petitesse quotidiennes de l’actuel État de police (pénitentiaire).

Anna
Messine, mars 2021

*****

Italie : Encore une accusation d’association subversive pour l’anarchiste Anna Beniamino

Malacoda / dimanche 28 février 2021

Depuis que la DNAA (Direzione Nazionale Antimafia e Antiterrorismo, Direction nationale anti-mafia et antiterrorisme)a commencé, en 2015, a coordonner les différents parquets antiterrorisme, ceux-ci jouent à celui qui file plus facilement une inculpation pour association subversive. La police pénitentiaire [nom officiel des matons en Italie ; NdAtt.] commence a participer elle aussi à ce défi : depuis l’automne 2020, une section de la pénitentiaire apporte sa contribution à la DNAA.

Du coup, vendredi 26 février, la Digos [la police politique ; NdAtt.] de Messine s’est présentée à la prison de cette ville pour signaler à la compagnonne Anna Beniamino une nouvelle accusation pour association subversive. Selon les enquêteurs, Anna aurait reçu, envoyé par la poste, un disque dur externe, au contenu inconnu ; voilà leur accusation, d’où découle tout ça. L’ironie – ou plutôt l’idiotie – est que le disque dur en question contient le dossier des enquêtes pour une autre accusation d’association subversive, l’opération Scripta Manent. Anna a été autorisée à le recevoir, en 2017, de façon qu’elle ait accès au dossiers de cette enquête. Depuis 2017, ce disque dur a suivi Anna dans les différentes prison où elle est passée, donc : Rome-Rebibbia, L’Aquila, Lecce, Messina, encore Rebibbia et encore Messine, jusqu’à arriver à la géniale intuition du Parquet de cette ville.

Pour écrire à Anna (et à Alfredo, lui aussi condamné dans le cadre de l’opération Scripta Manent) :

Anna Beniamino
C. C. “Gazzi” femminile
Via Consolare Valeria, 2
98124 – Messina
(Italie)

Alfredo Cospito
C. C. di Ferrara
Via Arginone, 327
44122 – Ferrara
(Italie)

Ce contenu a été publié dans International, Nique la justice, avec comme mot(s)-clé(s) , , , , . Vous pouvez le mettre en favoris avec ce permalien.