L’état d’urgence prolongé pour six mois par l’Assemblée (MAJ 21/7 : il a été encore durci)

extrait du Monde / mercredi 20 juillet 2016

Et de quatre. Dans la nuit de mardi 19 à mercredi 20 juillet, les députés ont donné leur feu vert à une nouvelle prorogation de l’état d’urgence au terme d’un débat houleux dans l’hémicycle, bien loin de l’ambiance consensuelle des premières fois. A 4 h 53, et à 489 voix contre 26 et 4 abstentions, l’Assemblée nationale a adopté le projet de loi du gouvernement en étendant la durée de prolongation de cet état exceptionnel de trois à six mois, soit jusqu’à la fin du mois de janvier 2017. […]

Outre l’extension à six mois de la durée de prorogation, une poignée de propositions de l’opposition ont toutefois été reprises. Le rapporteur, Pascal Popelin (Parti socialiste, Seine-Saint-Denis), a ainsi rejoint le président du groupe de droite Christian Jacob (Seine-et-Marne) pour autoriser, pendant l’état d’urgence, lors des contrôles d’identité, la fouille des bagages et des véhicules sans instruction du procureur de la République si le propriétaire ne donne pas son accord.
Un amendement d’Eric Ciotti, ayant pour objectif de « supprimer, en matière de terrorisme, toute automaticité de réduction de peines », a également été adopté. Mais, dans l’ensemble, la grosse offensive de surenchère sécuritaire de la droite, emmenée principalement par le député niçois, a été endiguée.
Les mesures pour autoriser la fermeture administrative de certains lieux de culte ou interdire leur financement par des fonds étrangers n’ont pas rencontré de consensus, tout comme les propositions d’assigner à résidence ou de placer sous surveillance électronique les personnes fichées « S » et celles visant à faciliter les expulsions des étrangers soupçonnés ou condamnés pour terrorisme. […]
Dans le cadre de l’état d’urgence, 77 personnes sont toujours concernées par les assignations à résidence. Quant aux 3 594 perquisitions administratives menées jusqu’au 25 mai, elles ont permis l’ouverture de près de 600 procédures judiciaires et la saisie de 756 armes, dont 75 armes de guerre. Plus de 950 personnes font aujourd’hui l’objet d’investigations de la part de la juridiction antiterroriste. Enfin, depuis le rétablissement des contrôles aux frontières, le 13 novembre dernier, 48 millions de personnes ont été contrôlées ; 28 000 individus ont été empêchés d’entrer sur le territoire.

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Le Monde / jeudi 21 juillet 2016

Députés et sénateurs réunis en commission mixte paritaire se sont mis d’accord, mercredi soir 20 juillet, sur un texte commun pour prolonger l’état d’urgence jusqu’à fin janvier 2017, moins d’une semaine après l’attentat de Nice. Le projet de loi devra encore être formellement voté par les parlementaires jeudi pour être définitivement adopté.
Lors de la commission, qui a duré moins d’une heure, les députés ont accepté des amendements des sénateurs interdisant les rassemblements dont la sécurité ne serait pas assurée, et facilitant la fermeture des lieux de culte dans lesquels sont tenus des propos incitant à la haine et à la violence. Il s’agit du renforcement de mesures déjà existantes et utilisées.
Ils ont également retenu l’automaticité de la peine complémentaire d’interdiction de territoire français pour les personnes étrangères condamnées pour terrorisme et l’interdiction de la semi-liberté pour les condamnés en rapport avec le terrorisme.
Les députés ont en revanche refusé l’application du régime de la rétention de sûreté et de la surveillance de sûreté aux personnes condamnées pour un crime terroriste que voulaient les sénateurs. Les sénateurs ont également renoncé à la création d’un délit de séjour sur un théâtre d’opérations terroristes extérieures au profit d’un renforcement de la dernière loi antiterroriste, adoptée en juin. Celle-ci permet un contrôle administratif (avec assignation à résidence) des personnes revenant de Syrie et d’Irak lorsqu’il n’existe pas d’éléments suffisants pour les mettre immédiatement en examen pour terrorisme. Ce contrôle, jusque-là limité à un mois, pourra dorénavant être porté à trois mois.
Les sénateurs avaient adopté à une très large majorité, quelques heures auparavant, le projet de loi, en durcissant le texte. Les groupes PS et radicaux de gauche ont voté pour, de même que celui des Républicains, à quelques exceptions près, et de l’UDI. Seuls le groupe Front de gauche et quelques députés écologistes ont, comme les fois précédentes, voté contre le projet, qu’ils jugent au mieux inefficace, au pire comme une atteinte aux droits fondamentaux.
La prolongation, de trois mois, de l’état d’urgence avait été décidée par François Hollande quelques heures après l’attaque qui a fait 84 morts et 300 blessés à Nice. Peu avant 5 heures mercredi, au terme d’un examen marathon, les députés ont adopté, par 489 voix contre 26 et 4 abstentions, ce quatrième projet de loi de prorogation, tout en la portant à six mois, comme le demandaient Les Républicains.

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Le Parisien / jeudi 21 juillet 2016

Les députés n’ont pas seulement décidé de la prolongation de l’état d’urgence pour six mois, ils ont également décidé de l’enrichir de nouvelles mesures qui devraient donc entrer en application le 27 juillet, pour une durée de six mois. Les sénateurs ont voté hier, en début de soirée, le texte des députés, mais en le renforçant. Une commission mixte paritaire réunissant députés et sénateurs qui s’est réunie dans la foulée a permis de trouver une version commune aux deux Chambres. Elle sera soumise ce midi aux députés puis aux sénateurs dans l’après-midi pour son adoption définitive. Le texte tel qu’adopté par les députés signe d’abord le retour des perquisitions administratives. Décidées par le préfet en dehors de tout cadre judiciaire, près de 3 600 perquisitions administratives avaient été menées entre le 14 novembre et le 26 mai, c’est-à-dire durant les deux premières périodes d’application de l’état d’urgence. Elles avaient été abandonnées lors de la 3e prolongation, du 26 mai au 26 juillet, notamment en raison d’une censure du Conseil constitutionnel qui avait interdit l’exploitation des données informatiques saisies à l’occasion de ces perquisitions. Le projet voté les rétablit et prévoit désormais la possibilité de saisir et d’exploiter les données informatiques découvertes. De plus, les personnes présentes sur les lieux de ces perquisitions pourront être en retenue administrative le temps de ces perquisitions, dans la limite de quatre heures maximum.
Le texte généralise également les fouilles des véhicules et bagages lors d’un contrôle d’identité sans avoir besoin d’instructions préalables du procureur de la République. Les crédits de réduction de peine automatique sont supprimés pour les condamnés pour terrorisme, y compris des faits d’apologie du terrorisme. Enfin, le texte permet de placer les cellules de détenus sous vidéosurveillance 24 heures sur 24 lorsque « l’évasion ou le suicide du détenu pourrait avoir un impact important sur l’ordre public ». Cette décision est prise par le ministre de la Justice, pour une durée de trois mois renouvelable. Un dispositif déjà appliqué à Salah Abdeslam, détenu à Fleury-Mérogis.

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