Besançon : Quand les gendarmes veulent récupérer leur matos (et foutre la pression au passage)

Radio Bip / vendredi 16 avril 2021

L’histoire peut prêter à sourire, mais l’expérience lui fut pour le moins indélicate. Fin mars dernier, un bisontin a été informé qu’un traqueur GPS avait été fixé sous son véhicule personnel. Une façon de suivre à la trace ses moindres déplacements, annoncée par… les gendarmes eux-mêmes. Six mois après avoir été mis hors de cause dans une enquête, il a ainsi été contacté par la section départementale du Doubs afin de soustraire un appareil dont il ignorait tout. Anarchiste convaincu sans antécédent judiciaire, ce témoin a le sentiment d’être « ciblé pour ses idées. »

Nous rencontrons David (Le prénom a été modifié) en soirée, un peu en marge de la vieille-ville. Éducateur de profession, le jeune homme n’a jamais caché sa sensibilité au concept de lutte des classes ou aux principes autogestionnaires. Néanmoins, il ne pensait pas qu’il ferait un jour l’objet d’autant de considération. « Son affaire » commence le 22 septembre 2020, lorsque au petit matin quatre gendarmes entament la perquisition de son domicile et le placent en garde-à-vue. Une audition sous l’égide de la JIRS de Nancy, pour « destruction d’un bien par incendie en bande organisée. »

Cette première n’ira pas plus loin, le bisontin sans histoire étant relâché et mis hors de cause. « Il m’était juste reproché mes opinions et engagements libertaires, mon apparition auprès des gilets jaunes, ainsi que mes liens présumés avec un autre interpellé » précise t-il. Alors que « tout cela est derrière lui », il est contacté le 22 mars par la gendarmerie locale. « Un militaire m’a demandé si je possédais toujours ma voiture, de marque X et de modèle Y. J’ai dis que oui, et il m’a donné rendez-vous à la caserne des Justices en indiquant que c’était pour enlever un mouchard. »

David examine son véhicule, et remarque bien une bizarrerie au niveau du bas de caisse avant-droit. Lui et sa compagne se rendent donc trois jours plus tard aux heure et lieu convenus, où un technicien procède au retrait de cette « petite boite de Pringles. » Installée là depuis mai 2020, dixit l’uniforme. Six mois après avoir été blanchi, il apprend donc être potentiellement resté sous étroite surveillance. « Les lois scélérates sont abrogées depuis trente ans, mais la chasse aux opposants perdure » conclut-il. Sollicités, ni la gendarmerie ni le Parquet n’ont pour l’instant réagit.

Les articles 230-32 à 230-44 du code de procédure pénale définissent « [le recours] à tout moyen technique destiné à la localisation en temps réel […] d’une personne, à l’insu de celle-ci, d’un véhicule ou de tout autre objet, sans le consentement de son propriétaire ou de son possesseur, si cette opération est exigée par les nécessités […] » Un texte apparaissant aujourd’hui inaltérable mais qui jadis n’avait cessé de fluctuer, entre les arrêts de la cours de cassation et les décisions du conseil constitutionnel souvent sévères sur les limites impérieuses à ne pas franchir.

Reste que les latitudes accordées sont désormais encore très généreuses, de tels dispositifs pouvant être justifiés par le seul soupçon de n’importe quel crime ou délit et ce jusque durant deux années. Concernant les infractions jugées les plus graves, dont par exemple « l’aide à l’entrée, la circulation, ou le séjour irréguliers d’un étranger », le temps alloué est celui de l’instruction, la pose pouvant même être commandée y compris par l’intrusion dans une habitation. Et si les opérations doivent en principe être motivées, toute réclamation est impossible en la matière. […]

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