Madrid (Espagne) : Contre l’application « Carte de santé virtuelle » et la dictature de la techno-santé

Contra Toda Nocividad / mercredi 16 décembre 2020

« La médecine a fait tellement de progrès que plus personne n’est en bonne santé »
Aldous Huxley

La proclamation, en mars dernier, de la part de ceux qui gèrent et administrent nos vies, de « l’urgence sanitaire » à cause de la Covid19, a mené à la mise en place de divers projets d’ingénierie sociale ; le monde entier a été transformé en immense laboratoire où tester toutes les « armes », dans la guerre contre le virus. La technocratie sanitaire au niveau mondial a transformé nos corps en agents pathogènes, c’est-à-dire que nos corps sont transformés en « dangers » capables de transmettre le virus, capables de tuer… cette idée, transmise ad nauseam à travers tous les moyens de notre société technisée, a pénétré profondément dans l’imaginaire social, nous faisant nous méfier de notre voisin, de notre ami, du membre de notre famille, etc… c’est-à-dire de la communauté, afin de nous déposséder de la petite communauté qui nous restait, remplacée maintenant, comme tout le reste, par des relations virtuelles, par une communauté virtuelle. Quel meilleur moment, dans leur logique, pour régler et rendre encore plus rationnels l’espace et le temps, tout comme nos mouvements, nos actions, nos pensées, etc., pour imposer une distanciation sociale qui, il ne faut pas se leurrer, nous touchait déjà, et avec force, par le biais de l’extension de la numérisation à toutes les sphères de notre vie et qui, comme nous l’avons vu, a connu une croissance exponentielle depuis « l’urgence sanitaire ». Le transhumanisme est en train d’imposer sa logique dans la société : la numérisation et la peur des corps, de l’organique, de ce qui n’est pas mesurable, du sauvage… en créant un monde désincarné et numérique où chaque lien disparaît et où nous sommes gouvernés par une machine algorithmique.

La carte de santé de la ville de MadR.I.P.

Hier, lundi 14 décembre, un de ces projets d’ingénierie sociale imposés sous prétexte d’« urgence sanitaire » a pris forme : l’application pour smartphones nommée « Carte de santé virtuelle » [Tarjeta Sanitaria Virtual – TSV]. Créée en juin dernier par la Communauté de Madrid, elle contiendra les tests liés au coronavirus, des PCR aux tests antigéniques et aux sérologies, effectués tant dans des centres publics que dans les laboratoires privés, ainsi que des informations sur la manière d’intervenir en cas de résultat négatif ou positif.
La création de cette fonction dans la Carte de santé signifiera la sélection des personnes en fonction de leur état de santé… Eugénisme sanitaire ? Hygiénisme sanitaire ? Ces mots semblent exagérés? Il n’y a pas si longtemps, les nazis marquaient ceux qu’ils considéraient comme inférieurs, en fonction de leurs patrons ; aujourd’hui, la dictature techno-sanitaire marque les malades… dans différents États du monde, il existe d’autres types de documents nécessaires à la vie sociale, comme, par exemple, la liste des antécédents judiciaires, qui permet, selon son contenu, de trouver un emploi ou de se le voir refuser ; dans certains États des États-Unis, les lois sont tellement rigides qu’il est facile d’avoir des antécédents qui, durant des années ou pour toujours, conditionneront votre vie.
La TSV implique la possibilité d’offrir vos données de santé à un tiers. Le titulaire de la carte peut montrer ses résultats à un tiers, s’il le juge nécessaire, y compris un code QR qui le dirigera vers une page de vérification où le Service de santé de Madrid validera que ces informations sont correctes. Ces tiers peuvent être n’importe qui, du service des Ressources humaines de n’importe quelle entreprise qui vous fait passer un entretien d’embauche, au vigile lors d’une manifestation sportive, à l’agente de sécurité chargée de contrôler l’entrée d’un concert… ou peut-être demain le contrôleur du métro ou le vigile d’un supermarché, c’est-à-dire que nos données les plus personnelles et les plus intimes seront entre les mains de n’importe qui ; la société de surveillance s’étend à pas de géant dans le domaine de la santé. Nous serons sélectionnés selon notre état de santé, bienvenue à la nouvelle dictature techno-sanitaire, car une TSA incluant des données sur le fait que nous avons ou avons eu la Covid19 ouvre la voie au fait que, demain, soient indiqués sur la Carte de santé des données sur toute autre maladie que les patrons considèrent comme dangereuse. Elle ouvre la voie aussi au fait que toute maladie que nous avons ou avons eu soit mise entre les mains de tiers ; sans aller plus loin, aujourd’hui toutes ces informations sont déjà entre les mains du Système de santé publique, qui pourrait, peut-être demain, vendre nos données à Google ou à toute autre entreprise médico-pharmaceutique intéressée. La sélection basée sur nos données de santé s’accroît et elle ouvre également la possibilité d’étendre l’utilisation de ces méthodes à d’autres domaines qui ne sont pas exclusivement sanitaires.

Il est évident que cela conditionnera notre vie, notre comportement, notre façon de voir le monde, puisque nous essaierons de régler notre vie dans le but de ne pas « nous faire contaminer », de ne pas être signalés en fonction de notre santé et de pouvoir mener à bien nos différentes activités sociales. Ils ne cessent de répéter que ces données seront anonymes, afin que nous l’utilisions ou que nous nous plions à sa nécessité, néanmoins la TSV, que nous installons dans nos téléphone intelligents, tout comme le reste des dits objets intelligents, n’a rien d’anonyme, chaque pas que nous faisons dans le monde virtuel est enregistré, analysé et transformé en donné. Et, pour paraphraser le poète allemand, nos appareils intelligents ont un nom et une adresse et ce sont les nôtres. Les grandes entreprises pharmaceutiques et technologiques (Google, Amazon, Microsoft, etc. sont en train d’investir des sommes énormes dans les produits pharmaceutiques) sont très intéressées aux données de nos corps ; la biométrie des corps est une nouvelle source dans le but de maximiser les profits. Il faut donc s’attendre à ce que nos données personnelles et intimes, enregistrées dans la TSV, finissent tôt ou tard entre les mains de tiers qui feront des affaires avec elles ; une fois de plus nous serons transformés en simple marchandise, en nombres d’où tirer un maximum de bénéfices. La marchandisation de notre corps est en train de devenir une grande affaire pour le capitalisme techno-scientifique. Les possibilités offertes par la biologie synthétique, les thérapies génétiques, les technologies de reproduction, l’industrie du clonage, etc… impliquent l’artificialisation et la fragmentation des différentes parties de nos corps, transformées en objets pouvant être conçus, fabriqués, achetés et vendus.

C’est pourquoi nous devons refuser leur monde intelligent, qui modèle nos vies, qui prétend nous adapter au monde-machine, en nous transformant en simples automates. Refusons d’être convertis en simples nombres qui entrent dans leurs calculs rationnels, refusons de fournir nos données pour qu’ils soient utilisés pour réorganiser nos vies. Pour l’anarchie. Mort au progrès.

Contra Toda Nocividad, décembre 2020

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