Chili : Un regard anarchiste sur la situation de révolte et de répression (deuxième partie)

reçu par mail / samedi 21 décembre 2019

Cela fait plus d’un mois que nous avons diffusé la première partie de ce texte, en partageant des informations et des réflexions anarchistes sur le contexte chilien depuis le début de l’ainsi-dite «  explosion sociale » qui s’est déclenchée le 18 octobre dernier. Le texte précédent allait jusqu’à la veille de la grande manifestation dans le centre-ville [de Santiago ; NdAtt.], annoncée pour le vendredi 25 octobre.

Depuis ce jour et jusqu’à présent, se sont produits de nombreux événements qui pourraient être exposés en détail ; cependant nous avons sélectionné certains éléments et réflexions qui nous semblent pertinents à diffuser, en sachant que d’autres compas ont également contribué à répertorier et faire circuler des informations sur ce qui se passe dans ces territoires en révolte.

Nous espérons que ces mots que nous envoyons à nos compas de partout puissent à nouveau contribuer à la propagation d’expériences et de réflexions, qui puissent être diffusées dans les langues et les latitudes les plus différentes où s’exprime l’anarchie :

1. LA TENTATIVE RATÉE DE PACIFIER LA RÉVOLTE

Avec plus de 1,5 million de personnes dans le centre-ville de Santiago, la « plus grande démonstration de l’histoire », auto-convoquée pour le vendredi 25 octobre, a rassemblé toute la diversité des personnes en lutte. Avec une participation des partis politiques de gauche pratiquement nulle et sans aucune capacité de menace de la part des groupes fascistes, toutes les formes de manifestation ont eu lieu jusque tard dans la nuit, malgré la restriction du couvre-feu, y compris une fois de plus des dures émeutes et des affrontements avec les forces répressives, dans le centre et la périphérie de Santiago et d’autres villes.

Alors que la répression faisait son travail, en propageant et en intensifiant ses diverses formes de violences, le gouvernement et les médias ont tenté d’imposer l’idée que cette manifestation serait le point culminant d’un processus par lequel les gens ont exprimé leurs revendications et qu’il était temps d’un « retour à la paix ». Les chaînes de télévision ont achevé cette nuit-là les transmissions conjointes, initiées le 18 octobre, et, suite à la campagne de blanchiment de l’image de l’armée, dans les jours suivants le gouvernement a retiré les troupes des rues. Puis, le samedi 26 et dimanche 27 octobre, a été décrétée la fin du couvre-feu à Santiago et dans d’autres villes du pays.

Le pouvoir pariait le tout pour tout sur un retour à la normale le lundi 28 octobre, mais la réalité a montré quelque chose de complètement différent et peut-être surprenant : des milliers de personnes sont retournées dans les rues et ont occupé le centre-ville avec des cacerolazos [manifestations pacifiques, mais très bruyantes, quand tout le monde tape sur des casseroles etc. ; NdAtt.],
des pancartes, des rassemblements, des émeutes et des affrontements avec la police, sous le mot d’ordre « il n’y aura pas de retour à la normale ». Le pouvoir a perdu une nouvelle partie face au mécontentement, la protestation et le chaos généralisé et à partir de là une nouvelle phase d’explosion [sociale ; NdAtt.] a commencé à prendre forme.

2. LA CONTINUITÉ DES MANIFESTATIONS ET DES ÉMEUTES

Au fil des jours, les villes se transforment en un scénario dans lequel le progressif « retour à la normale » du travail, du commerce et du système des transports coexiste et entre en conflit avec la permanence des mobilisations, des émeutes et des instances d’auto-organisation dans les quartiers, par le biais d’assemblées locales et d’autres instances de rencontre et de participation politique.

A partir du lundi 28 octobre, chaque semaine, commencent à avoir lieu trois ou quatre jours de protestations massives et intenses, principalement dans le centre-ville de Santiago. Le palais du gouvernement a d’abord été encerclé par la police et pendant plusieurs jours des émeutes ont éclaté aux abords de ce périmètre. Plus tard, face à l’encerclement répressif autour du palais du gouvernement, les protestations ont continué à s’auto-convoquer dans le secteur de Plaza Italia, lieu emblématique du centre-ville qui a été rebaptisé « Plaza de la Dignidad » par les manifestant.e.s. Les affrontements avec la police, les barricades, les pillages et les attaques contre les locaux de l’État et des entreprises se sont déplacés là-bas, eux aussi.

Dans d’autres régions du pays aussi les protestations se sont poursuivies, avec la présence de manifestant.e.s de différents types qui commencent à exprimer leur gratitude et leur appréciation envers les personnes cagoulées présentes sur l’ainsi-dite « première ligne », en confirmant l’idée que ces personnes sont prêtes à risquer leur vie et leur intégrité physique pour permettre que d’autres puissent manifester. Cette idée s’est maintenue jusqu’ici, en parallèle avec l’accroissement de la répression, la désapprobation croissante à l’encontre du gouvernement et le discrédit massif dont font l’objet les médias

3. DES DISPOSITIFS DE RÉPRESSION MASSIVE ET SÉLECTIVE

Avec le retrait des militaires des rues, c’est la police, en uniforme et en civil, qui est la force répressive chargée d’attaquer la révolte en cours. Certaines des méthodes et des outils employés pour une répression massive et sélective ont été les suivants :

– des tirs tendus de chevrotine et de grenades lacrymogènes visant le corps de manifestant.e.s, concentrés dans la zone de la tête et des yeux, ce qui a provoqué un grand nombre de personnes blessées, avec des niveaux variables de blessures au visage, au crâne et aux yeux, y compris la perte totale des yeux et e la vue. À ce jour, on décompte plus de 20 des manifestant.e.s mort.e.s et plus de 200 personnes avec de graves lésions oculaires ; particulièrement significatif est le cas de l’étudiant Gustavo Gatica, qui a complètement perdu la vue suite à une attaque policière.
– Des intoxication et brûlures dues aux produits chimiques présents dans le gaz lacrymogène et dans le liquide des canons à eau.
– Des tabassages et des coups de toutes sortes contre des adultes et des mineurs, en plus d’agressions contre personnes et animaux vivant dans la rue.
– Des détentions avec agressions physiques et psychologiques envers toute typologie de manifestant.e.s, y compris des agressions sexuelles de différentes sortes, principalement contre des femmes et des personnes de genre non binaire.
– Des simulations de pelotons d’exécution pour des personnes détenues.
– L’utilisation de drones, de véhicules et de policiers en civil pour chercher, suivre et arrêter les personnes identifiées comme des émeutier.e.s.
– Des agressions et arrestations de personnes qui ne participent pas activement aux manifestations, y compris les bénévoles qui mettent en place des formes autonomes et solidaires de premiers secours pour venir en aide à celles/ceux qui protestent. A titre d’exemple de ce qui précède, on peut citer le cas d’Abel Acuña, un manifestant qui a perdu la vie le 15 novembre, sur la Plaza Dignidad, parce qu’il n’a pas pu être soigné correctement, en raison de l’attaque répressive dirigée contre l’équipe de premiers secours qui essayait de le ranimer. Il y a aussi le cas de Fabiola Campillai, une femme qui a perdu ses deux yeux et a eu une fracture au crâne, à cause de l’impact d’une grenade lacrymogène qui lui a été lancée au visage par la police, lors d’une émeute, alors qu’elle se rendait à son travail.
– L’acquisition et l’utilisation de nouveaux instruments de répression, comme les dépenses de plusieurs millions pour l’achat de nouveaux véhicules de police, des gaz hautement toxiques capables de provoquer des vomissements et la perte de contrôle du sphincter, des cartouches chargée avec du verre moulu, des grenades incapacitantes et des instruments à impact sonore unidirectionnel, capables d’étourdir et de laisser avec un traumatisme acoustique temporaire ou permanent ceux/celles qui sont frappé.e.s par un choc sonore capable de faire éclater le système auditif humain.

– On a signalé des cas de répression ciblée des manifestant.e.s, des dirigeant.e.s d’organisations sociales, étudiantes et de défense des droits humains, sous forme de menaces de mort, de détentions, soit dans des postes de police soit chez eux/elles, ainsi que des agressions, des traitements dégradants et des interrogatoires avec menaces et tortures de différents types. A ce propos on peut mentionner l’existence de témoignages et de vidéos qui ont dénoncé, le jeudi 21 novembre, l’utilisation de la part de la police d’un centre commercial pillé dans la commune de Quilicura comme lieu secret de détention et de torture pour garder des personnes qui ont été battues, obligées de glorifier la figure du flic et ensuite relâchées au milieu de la nuit complètement nues.
On compte aussi le cas d’un jeune étudiant de la ville de Antofagasta qui, le 6 novembre, a dénoncé le fait que que la nuit précédente il avait été intercepté par une camionnette rouge avec des policiers en civil, qui ont essayé de l’embarquer pour un contrôle d’identité. Après le refus du jeune homme, il a reçu un choc électrique à la poitrine et ensuite il a été emmené dans un lieu de détention clandestin, où il a pu voir d’autres personnes arrêtées et battues, tandis que lui il a été torturé avec l’insertion d’aiguilles sous ses ongles, en exigeant qu’il fournisse des renseignements sur les personnes et les organisations qui étaient à la manifestation.

Pour garder et couvrir ces actes répressifs, la police, le gouvernement et la presse ont maintenu une défense et une protection farouches de l’action policière. En parfaite coordination, les autorités policières, les membres du gouvernement, les journalistes et les personnalités des médias au service du pouvoir se sont préoccupés de soutenir la thèse selon laquelle la police est dépassée par l’action criminelle des vandales, tout en censurant les images et les informations à propos de la répression. La stratégie du pouvoir a également consisté à ignorer ou à remettre en question la véracité des rapports établis par diverses organisations non gouvernementales qui signalent la présence systématiques de méthodes de répression qui violent l’intégrité des personnes, en cherchant à traumatiser le corps de ceux/celles qui protestent. Ignorant ces rapports, le pouvoirs protège les agents de la répression et leur assure l’impunité.

4. LES INITIATIVES INSTITUTIONNELLES : RÉFORMISME ET RÉPRESSION DANS LE BUT DU RETOUR À LA NORMALITÉ

Le soir de jeudi 14 novembre, des représentants de presque tous les partis politiques présents au Parlement se sont réunis pour discuter d’une solution institutionnelle à la demande d’une nouvelle constitution, en essayant ainsi d’apaiser la révolte avec une issue réformiste. Aux petites heures du matin, ils ont communiqué que leur accord était d’appeler à un plébiscite, en avril 2020, afin de décider par le vote s’il fallait ou pas élaborer une nouvelle constitution pour remplacer celle qui reste en vigueur depuis la dictature de Pinochet. Si l’option d’une nouvelle constitution gagne, un autre plébiscite sera organisé, afin de décider des modalités selon laquelle celle-ci serait écrite.
Une option serait ce qu’ils appellent une « Convention constituante mixte » composée de députés et de délégués spéciaux choisi par le vote afin de participer au processus d’élaboration d’une nouvelle constitution. L’autre option serait ce qu’ils ont convenu d’appeler « Convention nationale constituante », à laquelle ne participeraient pas les membres du Parlement, mais seulement des délégués élus pour la rédaction d’une nouvelle carte constitutionnelle. Cette deuxième option serait la plus proche de la demande d’une assemblée constituante, portée par un secteur important de personnes mobilisées, qui considèrent la constitution actuelle comme un problème structurel à résoudre.

Parallèlement, l’État, la presse et les analystes politiques au service du pouvoir continuent avec le discours de l’ennemi intérieur, en se concentrant sur la figure des pilleur.euse.s et en faisant passer l’idée qu’il s’agirait de criminel.le.s lié.e.s au trafic de drogue et à l’anarchisme. Avec cela on veut une fois de plus criminaliser la protestation et établir un consensus avec les personnes qui défendent la protestation mais condamnent les pillages, à cause du fait qu’ils « donnent une image négative du mouvement », une stratégie qui cherche – et dans une certaine mesure réussit – à générer au moins un point de friction [parmi les manifestant.e.s ; NdAtt.] dont profite le pouvoir.

Le 28 novembre, quelques jours seulement après l’accord parlementaire sur le plébiscite constitutionnel, le Parlement a aussi approuvé la volonté de donner cours à des projets de loi présentés par le président Sebastián Piñera, des lois contre les émeutes, contre le port de cagoules, contre les pillages et contre la construction de barricades, en visant à punir plus sévèrement les expressions radicales de protestation et à répandre la peur parmi celles/ceux qui manifestent dans la rue. Il existe en outre un autre projet de loi qui vise à permettre l’emploi des militaires dans les rues sans que soit décrété l’ « état d’urgence », sous prétexte de surveiller les « infrastructures stratégiques », qui seraient par exemple, selon le gouvernement et les défenseurs de la proposition, les stations du métro, les centrales électriques et les bâtiments du gouvernement.

Ces tendances répressives ont été rejointes par des groupes de personnes opposées aux manifestations qui, depuis des semaines, s’organisant dans différentes villes pour protéger les locaux commerciaux, nettoyer les rues et aussi s’attaquer aussi aux manifestant.e.s, que ce soit en groupe ou individuellement, comme cela s’est produit le 10 novembre dans la ville de Viña del Mar, où un fanatique néolibéral de droite d’origine états-unienne a tiré sur un groupe de personnes qui participaient à la manifestation. Parmi ces personnes qui collaboraient avec le pouvoir, et sont généralement protégées par la police, on trouve des fascistes convaincus, des bourgeois et des citoyens « de classe moyenne » de toutes sortes, avec un discours de « paix ».

Ce qui est sûr c’est que, depuis le 18 octobre, plus de 35 000 personnes ont été arrêtées dans le cadre des manifestations, parmi elles 2 537 ont été placées en détention préventive, avec des accusations de vandalisme et d’incendie à l’encontre de stations de métro, d’attaques au cocktail Molotov lors des émeutes et d’autres accusations. Une coordination de solidarité avec ces prisonnier.e.s s’est constituée, en les revendiquant.e.s comme les prisonnier.e.s politiques de la révolte.

5. DE NOUVEAUX ÉLÉMENTS POUR LA LUTTE DE RUE

Du 18 octobre à aujourd’hui, on compte 107 attaques contre des postes de police de la part de manifestant.e.s. A cela il faut ajouter l’impact des rassemblements dans la rue de milliers de femmes, lors des manifestations et devant des bâtiments du gouvernement et de la police, afin de dénoncer la violence politique et sexuelle de l’État et de sa répression.

Au fil des semaines, à Santiago commencent à apparaître des appels à déplacer les protestations du centre-ville vers les secteurs riches de l’ainsi-dit « Barrio alto » situé à l’est de la Plaza Dignidad. Cela provoque des émeutes, des pillages et des attaques contre des sièges des partis politiques de droite, des locaux commerciaux et des bureaux d’affaires, ainsi que des affrontements avec la police et les citoyens qui défendent la paix des puissants.
Un autre élément important s’est avéré être la réponse à la répression. D’une part, à la suite de l’action répressive, l’utilisation massive de masques pour se protéger des gaz lacrymogènes et de lunettes de protection contre les tirs de la police vers les yeux des manifestant.e.s est devenue récurrente et indispensable. L’utilisation de boucliers pour se protéger des projectiles et des grenades lacrymogènes lancés par la police a été une autre innovation nécessaire pour permettre l’action de celles/ceux qui combattent en première ligne, en faisant face aux agents de la répression, qui sont aussi harcelés en permanence par des laser pointés par des manifestant.e.s au loin, ce qui entrave leur action et facilite l’identification des escadrons anti-émeutes au milieu de la nuit. Au milieu de tout cela, des groupes de premiers secours médicaux portent assistance aux manifestant.e.s blessé.e.s, tandis que d’autres individus solidaires aident les personnes affectées par les gaz toxiques et livrent des aliments aux cagoulé.e.s de la première ligne. Les conseils anti-répressifs sont diffusés tant par le bouche à oreille que, massivement, sur les réseaux sociaux, un moyen de communication qui a servi à la police pour identifier des manifestant.e.s, mais qui a aussi joué un rôle important dans la diffusion virale des informations à propos des actions répressives et des appels à des protestations de masse tout comme à des activités locales.

6. RIEN N’EST FINI

Depuis la joie révolutionnaire de participer au devenir chaotique d’un territoire insurgé, nous envoyons des signaux de combat, pendant ces moments dans lesquels le soutien mutuel, l’auto-soin, l’agitation et l’action sont des outils qui aident à répandre l’anarchie, ici et maintenant.

Nous savons que l’histoire montre que les scénarios de révolte et de durcissement du conflit avec l’ordre dominant ont tendance à être plus ou moins cycliques dans leurs progrès et leurs revers, mais nous savons aussi que ces soulèvements sont possibles, nécessaires et que leur force réside dans la participation directe et généralisée d’individus qui rompent, dans l’idée et dans l’action, avec l’ordre établi.

C’est pourquoi nous rejetons l’idéalisation romantique de la révolte avec la même force avec laquelle nous sommes en désaccord avec toute position qui présente comme une vérité incontestable la thèse selon laquelle la propagation chaotique des émeutes aurait été, avant toute, un plan orchestré par le pouvoir.

Ce qui est certain, c’est que malgré tous leurs efforts, le pouvoir et ses forces répressives n’ont pas pu arrêter la subversion des consciences, du sens commun, et l’utilisation des rues comme cadre de la lutte et de la confrontation contre un régime d’oppression.

En ce territoire, on vit une vie quotidienne faite de grande mobilisation et aussi d’éléments qui génèrent des tensions et des émotions de très différents types : la fatigue, l’épuisement, la colère et la peur jusqu’à la joie, la camaraderie, le courage et le désir de continuer à lutter, plus et mieux, avec nos affinités et avec les personnes avec qui nous interagissons dans le caractère multiforme de la révolte.

S’il est une chose dont nous ne doutons pas, c’est que cette fissure qui s’est ouverte dans le régime néolibéral chilien a fait place à un contexte qui combine de multiples éléments du passé, du présent post-moderne et de l’avenir de la guerre historique entre les personnes qui détiennent le pouvoir et celles qui se rebellent contre l’oppression.

Jusqu’à ce jour, de tels scénarios de révolte ont été et sont vécus par des compas du monde entier. Leurs expériences et ce qu’ils/elles ont appris ne manqueront pas d’attiser nos réflexions, comme déjà chaque geste de solidarité, matérialisé par la parole et par l’action, attise notre esprit.

PARCE QUE ICI ET MAINTENANT C’EST LA MEILLEURE SITUATION POUR L’ANARCHIE ET LA LIBERTÉ

NOUS CONTINUONS À LUTTER POUR COMBATTRE ET ÉCRASER, PARTOUT, LE CAPITALISE ET TOUTE FORME D’AUTORITÉ

Chili, le 18 décembre 2019
Sin banderas ni fronteras

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