Périgord : Récit d’une perquisition administrative

Non Fides / samedi 5 décembre 2015

Aux aurores, 9h du mat, un compagnon se fait réveiller par un tambourinage discret à la porte. Après un coup d’œil furtif, pour confirmer une présence malveillante, un bidasse se présente.

« M.X ?, gendarmerie (…), nous avons une perquisition administrative vous concernant »
Une compagnonne, présente dans la maison va voir la fille du copain.
Préparation hâtive. Pour échapper aux bidasses direction la taule d’école (…).
« C’est qui la personne qui est chez vous ? »
« J’en sais rien, elle vous dira son nom si elle veut »
La copine passe devant les merdeux.
Une dizaine à l’intérieur, la même à l’extérieur avec bijoux autour du cou pour ceux du jardin. Coup de pression facile devant une gosse de 9 ans pour obtenir l’identité de la compagnonne et se faire escorter jusqu’à l’école.
« Ça tombe bien on devait aller chez vous aussi, on ne sait pas si vous allez revenir, on vous suit jusque l’école »
La copine rassure la môme. La môme pige « T’as entendu, ils ont dit qu’ils savaient que tu les aime pas »
« Ouais, on leur fait caca dessus, ils puent trop la fesse crados »
Rires. Dépôt à l’école. Retour chez le copain.

De retour, on l’appelle par son prénom. Ça chauffe. Ils veulent partir de suite, mais elle a pas pris le café (…)
Les compagnon-nes se retrouvent au milieu des sacs à merde, impatienté-es d’en être déjà au prochain viol.
Refus de signer les papiers présentés avec le doigt insistant sur l’intitulé « qu’il existe des raisons sérieuses de penser que peuvent se trouver dans les locaux situés …., des personnes, armes ou objets susceptibles d’être liés à des activités à caractère terroriste »
Illes ont des perquisitions pour les bagnoles dont une qui est un césar bon marché depuis quelques années.
Dans la maison du compagnon, numéros et adresses sur papiers sont photographiés.
Un casque, un marteau chirurgical du début du siècle et une lacrymogène sont l’objet d’un montage artistouillistique pour une photo.
Les feux d’artifices aussi « Pourquoi vous avez ça ? » « Ben parce que c’est beau »
Tous les papiers sont vérifiés.
Essai de lire deux disques durs et un ordi en vain, tout est sous ubuntu. Vérification d’une vieille tour rafistolée. Prise de photos de bouquins, VHS, CD, DVD, affiches, demandent pourquoi il y a un fascicule avec les horaires de parloirs des taules « Vous avez un service de renseignements, voyez avec »
Vraisemblablement le vieux matos les laisse perplexes.

Trouvant des balles, un sursaut de bonheur se lit comme sur la gueule d’un minot devant les cadeaux d’un enfoiré barbu à l’heure de l’escroquerie de noël.
Ce fut furtif.
« Air soft ? » « Non pistolet à plomb » « C’est où » « Ben continuez votre travail »
Quelques niais-es demandent si c’est légal « oui oui (agacé) »(…)

Direction chez la compagnonne pour le deuxième viol matinal. Refus de monter avec elleux, empoignage, mise dans la bagnole. Emballée c’est pesé comme chez l’épicier.
« On a été assez patient avec vous »
Dans la bagnole, ça s’échange des phrases pour faire comprendre, avec la subtilité légendaire qui leur colle aux fèces que les téléphones étaient sur écoute.
Heureusement, elle a lu les guides pratiques et est restée prudente.
Arrivé-es en bas de l’immeuble, cerclé par les keufs aux même bijoux, le voisinage reste perplexe.
Après qu’elle leur ai ouvert, le protocole reste similaire.
« C’est bien chez vous, si il y a des personnes gna gna gna gna gna gna… »
Ca fouille et trifouille.
Des papiers CAF et pôle emploi sont pris en photo, dont un diplôme sur des manœuvres frauduleuses aux prestations.Réflexions et soupirs. L’ingratitude de la non reconnaissance d’un dur labeur.
Deux magnétophones à K7 sont saisis. Illes lui demandent comment ça fonctionnent, finissent par comprendre l’astuce des boutons. Illes s’étonnent que de tels vestiges se trouvent encore en état fonctionnel.
Un argentique est saisi également.
Bouquins, brochures, affiches sont pris en photo.
Un listing est fait des outils, avec prise de numéro de série.
Montrant un montage de fil du compteur à fusible jusqu’à deux batteries illes s’interrogent.
« C’est quoi ? » « mon électrac, vous êtes chez une pauvre »
Silence, photos.
Placard fouillé avec photo des vêtements et des chaussures.
Une petite frayeur dans la chambre les prend à la vue d’un gode ; illes sont là pour terrorisme religieux.
Quand ils croient tenir un vrai bout de gras à grailler, tout retombe.
Quel dommage.
« C’est quoi la clef ? » « Ben le double » « Ça fonctionne pas »
« Regardez bien » après la démonstration, l’ agacement. Mais c’était pas
super facile non plus.

Sur le retour chez le compagnon :
« Vous avez un téléphone » Vu la réflexion sur le téléphone à l’aller, c’est l’heure de la vengeance. « Non » Le keuf sort alors le haut de la pensée léniniste, pensant faire un tacle phénoménal. « La confiance n’exclut pas le contrôle » Il fouille son sac en sort un téléphone réparé au scotch. « Et ça ? » Il doit se dire que Lénine avait bien raison, le bougre, et fait faire une fouille au corps en guise de punition.
Chez le compagnon, des vestiges des années Mitterrand sont sorties, comme une veste sncf.
« C’est quoi ? »
« J’ai dû travailler, il y a longtemps »
Silence, Photo
Le tel du compagnon, véritable ruine d’arrière génération suscite autant de dépit.
« J’ai pas de matos pour lire les magnétos et tout, ça sert à rien de les prendre » (le bouton du mode lecture était un peu dur à enclencher) le même technicien éclairé matte les tels, vite fait sans les brancher à sa valoche high tech.
La voiture à haut pouvoir allergène semble gêner le plus vaillant d’entre eux.
Apparemment les poils de nos compagnons le dérange.
Dans le garage ils se gaussent à la vue de matos chirurgical des années 60.
Les outils sont répertoriés et pris en photo.
Illes ressortent.
Les compagnon-nes finissent par leur dire « en tous cas c’est fini, on votera plus à gauche »
Faute du droit qu’illes n’ont pas encore d’utiliser leurs jouets à ce moment précis, illes nous flinguent des yeux.
Finissent par s’enterrer dans leur pathétisme en demandant au technicien si illes doivent prendre un bouquin sur l’anarchisme en Tunisie.
Il ne daigne même pas répondre. Le bouquin est reposé.
« Eh monsieur c’est quoi déjà votre phrase sur la confiance ? »
Reflingage de regard et pas de réponse.
Toute la merde repart pour éviter de bouffer sur les heures de repas du midi.
Le moment du viol collectif s’achève.

Ni peur, ni surprise, mais encore plus de haine

des anarchistes old school.

[à ne pas confondre avec les gentils maraîchers perquisitionnés du même jour en Dordogne.]

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