Calais : Les migrants à l’assaut de la frontière (tandis que l’UE veut en expulser plus)

Nord Littoral / mercredi 7 octobre 2015

calais0Ce mercredi, à 17 h 50, la rocade de Calais a été à nouveau bloquée par des migrants, au niveau de la sortie vers le port de Calais, pendant une heure environ. Philippe Mignonet, adjoint à la mairie de Calais, était sur l’autoroute quand les migrants ont commencé à ralentir la circulation. « Ils procèdent toujours de la même manière, ils lancent divers objets sur l’autoroute pour faire ralentir le trafic, et quand les forces de l’ordre arrivent, ils essayent de monter dans les camions. » D’après lui, ils étaient environ deux cent sur la rocade, mais d’autres sont arrivés après pour tenter de pénétrer les poids lourds. « Ils essayaient d’abord avec les camions en tête de gondole, et après ils allaient vers l’arrière de la file. J’ai aussi vu des militants No borders au pied de l’autoroute. Pour moi, c’est une opération coordonnée. »

calais3Après l’interruption du trafic, les CRS ont d’abord coupé la circulation le temps d’évacuer tous les migrants des voies de circulation, avant de rétablir progressivement le passage. Ils les ont ensuite repoussés jusqu’à la « new jungle ». Pendant plusieurs heures, ils sont restés en poste rue de Garenne, au pied du pont de l’autoroute, pour empêcher les migrants de remonter sur les voies. D’après le syndicat Unsa-police, la situation était très tendue, les forces de l’ordre ayant subi des jets de cailloux pendant l’intervention. Ce à quoi ils ont répondu par l’envoi de bombes lacrymogènes, pour maintenir les migrants à distance de la rocade.

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Ils essayent de rejoindre les ferrys à la nage

La Voix du Nord / mardi 6 octobre 2015

Les quatre premiers Syriens, tous majeurs, ont été repêchés vers 22 h alors qu’ils traversaient le port de Calais à la nage pour tenter de rejoindre le ferry Seaways de la compagnie DFDS. « Arrivés sur place, les services de secours ont procédé à la prise en charge des migrants et à leur transport à l’hôpital de Calais, a indiqué ce mardi la préfecture du Pas-de-Calais. Certains souffraient d’hypothermie légère. C’est la Capitainerie du port qui a alerté la Police aux frontières. La PAF s’est immédiatement rendue sur les lieux en sollicitant l’aide des pompiers. Après une nuit passée sous surveillance médicale, les migrants sont ressortis de l’hôpital de Calais dans la matinée. »
Trois autres Syriens, tous majeurs également, ont été repêchés à leur tour vers 4 h du matin, au même endroit (du côté du port est, dans le bassin Ravisse). Selon la préfecture, « ils ont été ramenés sur les quais par les pompiers qui leur ont délivré des couvertures de survie. Ces migrants ont refusé d’être emmenés par mesure de précaution au CH Calais par les pompiers. Ces derniers ont donc patienté avec eux le temps de s’assurer qu’ils étaient dans un état de santé satisfaisant. »
La préfecture précise qu’ « à chaque reprise, des vérifications ont été effectuées dans le port pour s’assurer de l’absence d’aucun autre migrant. »
Pour rappel, un autre migrant, de nationalité marocaine, avait été repêché dans le port le 15 septembre dernier alors qu’il s’était jeté à l’eau avec un de ses compatriotes. Malgré les recherches réalisées dans le port à l’annonce de sa disparition, ce dernier n’a pas été retrouvé.

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Un “plan secret” pour expulser plus de migrants

Courrier International / jeudi 8 octobre 2015

Le quotidien britannique The Times s’est procuré un texte selon lequel l’Union européenne cherche à augmenter le nombre d’expulsions de migrants. D’après un document secret dévoilé à la une du Times le mercredi 7 octobre, les ministres européens de l’Intérieur cherchent à augmenter le nombre d’expulsions de migrants dont la demande d’asile a été rejetée. Cette année, près de 400 000 migrants arrivés dans l’Union européenne devraient en effet voir leur demande d’asile refusée.
“Une augmentation du taux d’expulsion devrait agir comme une forme de dissuasion contre l’immigration illégale”, peut-on notamment lire dans ce document, qui doit être discuté par les ministres européens de l’Intérieur le jeudi 8 octobre. Ce “plan d’action pour le retour (des migrants)” prévoit entre autres la création d’une unité spéciale dédiée aux expulsions au sein de l’agence européenne de surveillance des frontières (Frontex). Et les Etats qui n’appliquent pas la législation internationale en termes d’expulsion de “migrants en situation irrégulière” pourront être contraints de payer une amende.
Le Royaume-Uni ne sera pas contraint par cette mesure car elle ne fait pas partie de l’espace Schengen. Mais il y a de fortes chances pour que Theresa May, la ministre de l’Intérieur, la soutienne, car ce plan “accroît l’espoir de régler le problème des camps de migrants à Calais”, écrit The Times. La ministre a d’ailleurs appelé à la mise en place de “laissez-passer” (en français dans le texte) qui doivent servir de pièces d’identité alternatives pour les demandeurs d’asile sans passeport.
Ce projet suscite la colère de Tony Bunyan, directeur de l’ONG Statewatch, qui compare ces laissez-passer aux tristement célèbres “pass laws” qui limitaient les déplacements des Noirs en Afrique du Sud. “Ces réfugiés qui ont fui la guerre, les persécutions et la pauvreté ne veulent pas retourner d’où ils viennent.” Il pointe le fait que ce sont des pays tiers qui feront les frais d’une telle mesure. “On ne peut pas sérieusement s’attendre à ce que la Turquie, par exemple, accepte le retour sur son sol de centaines de milliers de réfugiés”, conclut-il dans le quotidien britannique.

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Plusieurs ministres européens insistent pour accélérer le retour des migrants économiques

Le Monde / jeudi 8 octobre 2015

« Les retours sont toujours durs, c’est comme ça », mais « ceux qui n’ont pas besoin de protection doivent quitter l’Europe », a insisté le ministre allemand de l’intérieur, Thomas de Maizière, jeudi 8 octobre. Une manière de mettre une nouvelle fois dos à dos migrants économiques et réfugiés politiques. Lors d’une réunion avec leurs homologues de l’Union européenne à Luxembourg, plusieurs ministres ont ainsi exprimé leur souhait de voir l’UE muscler sa politique de retours des migrants en situation illégale.

La Commission européenne a présenté un plan d’action aux États membres sur la façon d’améliorer les politiques de retour, et les ministres de l’intérieur devraient adopter un texte promettant « d’en faire plus ». « Des taux de retour plus élevés devraient dissuader l’immigration clandestine », estiment-ils dans ce texte.
« Nous pouvons accepter et soutenir les gens qui ont besoin d’une protection, seulement si ceux qui n’en ont pas besoin ne viennent pas ou sont renvoyés rapidement », a expliqué Thomas de Maizière. Même son de cloche côté britannique : « Il faut casser le lien entre le fait de faire ce voyage dangereux vers l’Europe et pouvoir rester en Europe », a plaidé la ministre de l’intérieur, Theresa May. « C’est la raison pour laquelle la Grande-Bretagne a toujours argué qu’il faut renvoyer les migrants dans leur pays d’origine, c’est la raison pour laquelle il faut réprimer ceux qui abusent de notre système d’asile », a-t-elle martelé.
Alors que Berlin devrait accueillir au moins 800 000 demandeurs d’asile cette année, le gouvernement britannique conservateur a toujours adopté une ligne très dure sur l’immigration, et ne participe pas à la répartition au sein de l’UE de réfugiés arrivés en Grèce et en Italie. Londres a en revanche promis d’accueillir dans les années à venir 20 000 réfugiés syriens provenant directement des camps de l’ONU dans des pays voisins de la Syrie.
Le ministre luxembourgeois de l’intérieur, Jean Asselborn, a estimé qu’il fallait « tout faire dans les prochaines semaines et prochains mois (…) pour qu’on puisse concrétiser les retours », alors qu’aujourd’hui, seuls 40 % des ordres de quitter le territoire intimés à des clandestins en Europe sont effectivement suivis d’effet.
Il a rappelé que les 28 chefs d’Etat et de gouvernement de l’UE tenteraient d’améliorer la coopération sur ce sujet avec les pays africains d’où les migrants économiques sont en grande partie originaires, lors d’un sommet à Malte en novembre.

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