Anarchist Black Cross Brighton / jeudi 17 octobre 2024
Certaines choses ne nous surprennent pas et je trouve bien sûr que le recours aux options judiciaires est dégoûtant, mais efficace. L’anarchisme est illégal ou ce n’est pas de l’anarchisme, comme nous le rappelle notre cher compagnon Gustavo Rodriguez. Néanmoins, au cours des derniers mois, mes avocats ont pu obtenir un rapport de renseignement de sécurité (Security Intelligence Report – SIR), produit par les bureaucrates anti-terroristes de la prison. Cette divulgation a eu lieu dans le cadre d’une demande de libération conditionnelle, qui de toute façon a été rejetée. Le secrétaire d’État s’est opposé à ma libération et a fait une requête de non-divulgation [de ce document], pour des raisons de « sécurité nationale », afin de m’empêcher de voir les « preuves » utilisées à mon encontre ou d’y répondre. Le tribunal des libertés n’a pas donné son accord et m’a permis d’avoir accès à huit maigres pages de rapports de renseignement. Celles-ci couvrent la période de septembre 2023 à janvier 2024 et donnent un aperçu incomplet de la surveillance et de la censure de ma correspondance et des livres qui me sont envoyés, de la collecte d’informations sur les personnes avec lesquelles je suis en contact et des renseignements reçus au sujet du rassemblement solidaire, avec des feux d’artifice, à la prison de Bristol, l’année dernière, quand j’y étais détenu.
Le rapport a révélé la collecte de tous les noms, adresses et détails personnels de toutes les personnes qui communiquent avec moi. Par exemple, il est indiqué qu’un compagnon écrit qu’il travaille comme facteur, qu’un autre compagnon « a une fille en prison », etc. Parmi ces informations, ils répertorient aussi toutes les connexions personnelles et tous les détails relatifs aux affiliations à des groupes ou tendances. Une analyse géographique a été réalisée à l’aide de Google Maps pour visualiser leurs positions géographiques. Le cinéma Star and Shadow, à Newcastle upon Tyne, est désigné comme un « point de rencontre potentiel » et le centre social BASE, Bristol, est décrit comme « un possible squat ou commune, largement recouvert de tags ».
Le niveau de renseignement et d’analyse affiché est donc faible et grossier, mais on peut s’attendre à ce que les données soient transmis aux services de sécurité et à l’État policier.
Le régime de sécurité auquel je suis soumis est dirigé de l’extérieur de la prison, par un comité* composé de hauts responsables de la police, de la Counter Terror Unit, de la National Security Division et de l’administration gouvernementale, ainsi que de psychologues du service médico-légale.
Nous savons que l’État a peur et prend des mesures répressives, mais il est rare que nous voyions des preuves de son mode de fonctionnement, c’est pourquoi je donne ce compte-rendu comme réponse.
Je n’ai rien à justifier.
Dans cette situation, je savais déjà parfaitement, avant sa divulgation, en quoi consistait la « preuve » secrète : le fait que je maintiens mes idées et mes contacts avec le milieu anarchiste et avec le mouvement social. Le fait que je continue à écrire « et à essayer de recevoir » des lettres et que l’on m’envoie des livres et des publications au contenu critique.
Je n’aurai pas une seule phrase d’excuses pour cela.
J’envoie mes salutations à Alfredo, Anna, Juan et à tou.tes les prisonnier.es et le compas persécuté.es en Italie.
À Francisco, Mónica et tou.tes les compas emprisonné.es au Chili.
Aux compas emprisonné.es et à ceux/celles qui luttent en Grèce.
Force à Daniela Klette, en Allemagne.
De même, à tou.tes les compas détenu.es, partout, ainsi qu’aux groupes d’action : je vous envoie une accolade et ma complicité.
Une accolade chaleureuse à Claudio, qui est libre, désormais.
Pour l’application d’une théorie pratique.
Pour une internationale noire.
Toby Shone
13 octobre 2024
HMP Garth
Nord-Ouest [de l’Angleterre]
* MAPPA [Multi-Agency Public Protection Arrangement] : arrangement de protection publique multi-agences.
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Répercussions suite à la publication de « Rien de surprenant »
Anarchist Black Cross Brighton / mardi 22 octobre 2024
En raison de l’envoi, de la part de Toby Shone, du texte « Rien de surprenant » à l’ABC Brighton, dans la matinée du 21 octobre il a reçu la visite du duo composé par Ian Turner et Mick McCormack, du service de prévention antiterroriste. Il a reçu trois sanctions administratives et est maintenant sous le régime Basic du IEP [Incentives and Earned Privileges], ce qui signifie pas de télévision et seulement cinq livres à dépenser par semaine. Les sanctions étaient pour : avoir écrit une lettre ouverte à Joe Black, de l’ABC Brighton, le 13 octobre (« Rien de surprenant » a été dicté par téléphone) ; plusieurs appels téléphoniques à une amie, au cours desquels elle l’a mis en haut-parleur pour qu’il puisse parler aussi à d’autres personnes présentes dans la pièce et pour avoir parlé irrespectueusement du personnel, y compris de sa conseillère de probation, Clare Ashton, au cours d’une conversation avec un autre contact, en septembre. Les deux personnes avec qui il a parlé ont été retirées de sa liste de contacts téléphoniques.
NB : Toby doit être libéré le 13 novembre 2024, après avoir purgé la totalité de sa peine. Celui-ci n’est que le plus récent (et, espérons-le, le dernier) acte vindicatif des « bureaucrates anti-terroristes » de la prison de Garth, dans la tentative de le punir pendant les derniers jours où il se trouve [incarcéré] « selon le bon plaisir de Sa Majesté ».