Pramen.io / mardi 30 avril 2024
Comme on a pu le voir dans une vidéo de propagande, publiée par les médias d’État sur YouTube, des anarchistes du groupe « Rossignols noirs » (Черные соловьи) ont été arrêté.es il y a plusieurs mois, au Bélarus. Selon la version du régime, ils/elles prévoyaient d’attaquer l’infrastructure de l’État et de saboter le soutien à l’armée russe en Biélorussie. La liste des membres du groupe comprend Maria Misyuk, Trofim Barysau, Sergey Zhigalyou, Dmitry Zahoroshko, Anastasia Klimenka et Aleksandra Pulinovich. En connaissant le comportement du régime biélorusse envers les anarchistes, nous croyons, jusqu’à preuve du contraire, que tout témoignage enregistré a été obtenu sous la torture.
Le régime de Loukachenko publie souvent des récits épiques sur ses opposant.es politiques, dans lesquels il raconte sa propre version de la réalité. Et peu importe la quantité de vérité qu’il y a dans ces histoires – ce qui est important est de transmette la sensation d’une menace constante, portée par l’Ukraine et en général par l’« Occident ». Ce n’est pas pour rien que le film lui-même insiste tellement sur le fait que Maria Misyuk a la nationalité ukrainienne. Comme pendant les 30 dernières années, nous entendons le même refrain sur « des ennemis, des ennemis partout ». D’un côté, on peut dire que plus personne au Bélarus ne croit à cette absurdité, mais la réalité est plus compliquée et une partie de la société continue à consommer la propagande de l’État biélorusse, mélangée à la folie diffusée par le « monde russe ».
D’autre côté, nous pouvons dire avec certitude que malgré toutes les tentatives, de la part du GUBOP [la section de la police biélorusse qui s’occupe de crime organisée et qui se distingue notamment dans la répression des opposant.es politiques au régime de Loukachenko ; NdAtt.], du KGB [le service de renseignement intérieur biélorusse, héritier local de celui soviétique ; NdAtt.] et d’autres structures répressives, depuis 2020, d’écraser le mouvement anarchiste, les anarchistes existent toujours au Bélarus. Les idées d’une libération de l’autoritarisme et de la création d’une société fondée sur la solidarité et la coopération continuent d’exciter les esprits des Biélorusses qui sont prêt.es à résister à la dictature de Loukachenko. Les tentatives de présenter les membres du groupe « Rossignols noirs » comme des simples « enfants » qui ne savaient pas ce qu’elles/ils faisaient est ridicule. Dans ce pays où, au 30 avril 2024, au moins 153 personnes âgées de 22 ans ou moins sont incarcérées pour des raisons politiques, nous voyons que les jeunes ne sont pas simplement des « recrues de la révolution », mais des participant.es à part entière à la lutte contre la dictature. Et l’appareil répressif le comprend parfaitement. Sinon, ce film sur la nécessité de combattre la radicalisation des jeunes n’aurait pas du tout paru dans les médias d’État.
Aujourd’hui, il est difficile de se faire une idée complète de ce qui s’est passé et de la répression contre ce groupe, mais nous pouvons déjà dire que, pour leur courage de résister politiquement au régime de Loukachenko, dans une société constamment terrorisée par l’État, ces militant.es méritent un profond respect et de la solidarité non seulement de la part du mouvement anarchiste, mais aussi de l’ensemble de la diaspora biélorusse. Par leur lutte, elles/ils ouvrent la voie à un avenir libre de dictateurs, de fascisme et de guerre.