Round Robin / jeudi 4 juillet 2019
Lors du parloir de ce matin (mercredi 3 juillet), le premier après un mois et seize jours de détention, Natascia a dit qu’elle va bien; elle a la pêche et le moral est bon, même si les conditions de détention à L’Aquila sont tellement horribles que son expérience à la prison de Rebibbia paraît, en comparaison, un vacance. Les matonnes comptent même les culottes et, à ce qu’il paraît, dans cet univers parallèle en forme de tombeau, une culotte en plus ou en moins c’est un problème. La prisonnière musulmane a été placée en isolement total, dans des conditions tellement inhumaines qu’ils ont beau parler de “droits de l’homme” et autres balivernes.
Au même temps, avec Anna et Silvia, Natascia ne se sent pas seule et cela lui donne encore plus de force. Depuis qu’elles ont arrêté la grève de la faim, elle déjeune avec Anna (Silvia est encore dans la prison des Vallettes à Turin [elle a été transférée pour un procès qui s’est tenu mardi 2; NdAtt.]. Les battages des barreaux continuent tous les jours.
Beaucoup de courrier, arrivée ou en départ, lui est bloqué par la censure. Néanmoins elle demande qu’on continue à lui écrire. À ce propos, elle demande que les gens arrêtent de mettre des timbres postaux dans les enveloppes, parce que les matons les gardent au lieu de les lui donner, de façon à l’obliger à les acheter à la prison. Dans la prison les timbres pour les lettres pour les autres pays d’Europe ne sont pas vendus et puisque ceux qu’on lui a envoyés ont été gardés, c’est un problème, parce qu’elle ne peur pas envoyer du courrier en dehors d’Italie (ce qui pour elle est très important).
La semaine dernière, elle a reçu une visite de la part du ROS [brigade des Carabinieri spécialisée dans la “gestion” de la criminalité organisée et du terrorisme; NdAtt.] : ils sont venus pour prélever son ADN. Au début, Natascia a refusé, puis, acculée, elle a décidé de céder, pourvu que ce soit elle-même qui se met le coton-tige dans la bouche, pour que, au moins, ils ne la touchent pas. Ça s’est passé comme ça.
Elle a aussi raconté de son arrestation brutale à Bordeaux, quand les gendarmes cagoulés ont défoncé la porte de la maison et l’ont amenée. Après, à un certain point ils lui ont mis un bandeau sur les yeux et l’ont laissée comme-ça, elle ne sait pas où, les mains menottées derrière son dos et les yeux bandés, pendant douze heures d’affilée.
Mais elle a aussi raconté de comment ça a été beau et émouvant d’entendre, depuis la taule, la chaleur et le solidarité dehors, le jour du rassemblement devant la prison; elle a aussi reçu les nouvelles à propos de ce qui se passe dehors et elle a bien reçu la solidarité et l’affect.