Un entretien avec des anarchistes d’Europe orientale

a2day / jeudi 6 juillet 2023

Sur la situation actuelle. Nous continuons la discussion avec des marxistes

Note d’Anarchy Today : nous avons récemment publié un entretien avec des membres de la Fraction internationale trotskyste-léniniste qui combattent actuellement en Syrie. Maintenant, les membres de l’équipe d’Anarchy Today répondent à leurs questions sur la situation actuelle dans la région BUR [Bélarus, Ukraine, Russie ; NdAtt.].

 

1. Avant l’invasion poutinienne, nous avons vu de dures luttes de la classe ouvrière, au Bélarus. Nous voulions vous demander comment le mouvement ouvrier affronte-t-il le gouvernement de Loukachenko et son partenaire Poutine?

Les plus grandes manifestations du Bélarus moderne, de milliers de travailleur.ses, ont eu lieu en 1991, officiellement c’était encore l’URSS. En 1993, une grève a éclaté dans le métro de Minsk, qui a été réprimée par les Streichbrechter (les flics). La même année, le Congrès des syndicats démocratiques du Bélarus, qui réunit des syndicats indépendants, a été fondé. Après que Loukachenko est arrivé au pouvoir, en 1994, tous les syndicats (à l’exception du Congrès des syndicats démocratiques du Bélarus, mais il n’avait pas beaucoup de pouvoir) ont été subordonnés à l’État et transformés en syndicats jaunes. Malheureusement, le Bélarus n’a pas et n’a jamais eu de tradition de lutte syndicale radicale. En 2020, lors des manifestations, dans la plupart des usines les travailleur.ses n’avaient aucune idée de comment se battre, il n’y avait aucune expérience de lutte radicale. Bien qu’ils/elles aient commencé à former des comités de grève, elles/ils n’ont pas réussi à organiser une grève générale. La majorité des travailleur.ses manquait non seulement d’une conscience révolutionnaire, mais même d’une conscience protestataire, il n’y avait aucun sentiment de solidarité incluant tout le Bélarus.

Le mouvement contre Loukachenko a uni des gens de différentes couches sociales. Il y avait des intellectuel.les, des étudiant.es, des ouvrier.es, des agriculteur.trices, même des riches hommes d’affaires et quelques policiers. Tout le monde avait ses raisons de protester. Un nouveau mouvement ouvrier est apparu, ils/elles ont appelé à une grève générale. Certains collectifs ont effectivement cessé de travailler. Cela s’accompagnait d’un blocage des routes. L’un des objectifs était de désorganiser le travail et d’empêcher les gens d’arriver au travail à l’heure. Pourtant, ce mouvement n’était pas assez fort. Même à son apogée, la plupart des industries fonctionnaient. Les dirigeant.es ouvrier.es ont été arrêté.es ou ont dû quitter le pays.

En 2022, les autorités ont finalement dissous le Congrès des syndicats démocratiques du Bélarus. Les dirigeants ont été emprisonné.es. Aujourd’hui, il y a des travailleur.ses mécontent.es sur le terrain, mais aucune ressource pour lutter. Toute tentative d’organisation de la base fait face non seulement à des licenciements, mais aussi à des peines de prison.

 

2. Le Bélarus n’a pas été le premier ni le dernier pays envahi par Poutine pour écraser un soulèvement massif. Que pouvez-vous nous dire sur le soulèvement au Kazakhstan et, avant, sur celui en Géorgie et dans le Caucase, ainsi que sur les invasions contre-révolutionnaires de Poutine ?
Comment luttez-vous pour obtenir l’unité des opprimé.es contre le régime meurtrier de Moscou et l’impérialisme qui pille ces nations ?

Au Kazakhstan, il y a eu plusieurs soulèvements, ces dernières années. Le dernier remonte à janvier 2022. Cela a commencé dans le district ouvrier de Janaozen, où, il y a une dizaine d’années, en 2011, il y a eu d’importantes manifestations ouvrières et la troupe a commencé à tirer et tué vingt ouvriers. En 2022, l’émeute s’est étendue à tout le pays ; elle a commencé avec des revendications économiques, en tant que protestation contre la hausse des prix du gaz, mais d’autres personnes ont essayé de renverser le régime. Elles ont pris d’assaut la résidence présidentielle et attaqué la police. Les autorités ont coupé Internet et les téléphones portables dans tout le pays et imposé la loi martiale. Beaucoup de gens ont été blessés, nous n’avons pas d’informations sur des manifestant.es qui auraient été tué.es. Selon les rapports officiels, environ 500 véhicules de police ont été détruits. Poutine (officiellement l’OTSC – Organisation du Traité de Sécurité Collective) a envoyé des troupes, qui ont aidé à rétablir l’ordre public et se sont rapidement retirées. Tout s’est passé si vite que les forces anti-totalitaires en Russie, même si elles en avaient eu les moyens, n’auraient tout simplement pas eu le temps d’offrir leur aide à la révolte au Kazakhstan.

Avant cela, en 1994, la Russie a commencé une guerre contre la république de Tchétchénie, qui faisait de jure partie de la Russie (de facto elle avait proclamé son indépendance). La guerre a fait de nombreuses victimes parmi la population civile tchétchène et elle a été menée dans le seul but de ramener le territoire rebelle au sein de l’empire. L’armée russe a gagné la guerre, mais son issue a été l’instauration du régime totalitaire de Kadyrov, qui est loyal à Moscou en échange d’énormes investissements et du droit de faire ce qu’il veut en Tchétchénie.

Plus tard, en se basant sur des conflits ethniques pré-existants, la Russie a envahi l’Ossétie du Sud (qui fait partie de la Géorgie) et l’a annexée à son empire.

En fait, en Russie toute l’idéologie officielle est basée sur l’idée d’un grand empire, d’une superpuissance qui peut dominer les autres et c’est ce à quoi les anarchistes de la région BUR se sont toujours opposé.es.

 

3. De loin, on peut voir que Poutine essaie de maintenir son rôle de gendarme, de défenseur du système capitaliste dans toute l’Eurasie, mais l’OTAN le permet de moins en moins…
Nous avons vu des grèves énormes, en France comme en Espagne, en Belgique, en Angleterre et même en Allemagne. Comment pensez-vous que les travailleur.ses de l’Europe de Maastricht peuvent s’unir dans leur lutte avec les travailleur.ses des pays de l’Europe de l’Est ?

C’est une question difficile. Tout d’abord, nous ne pensons pas que le monde des affaires, en Europe, se soucie vraiment des souffrances du peuple ukrainien (ou russe). Pour eux, la guerre porte du profit. D’autre part, pour ce que nous pouvons voir, de loin, la plupart des actions industrielles sont dues aux problèmes économiques. Les prix ont augmenté et les salaires restent bas. Les gens veulent plus de justice sociale, mais prendre plus de contrôle sur la production n’est pas une priorité. Malheureusement, la mauvaise situation économique est due aux sanctions [occidentales ; NdAtt.] et au refus d’acheter des matières premières bon marché venant de Russie et beaucoup de gens de la classe ouvrière accepteraient de rétablir des relations économiques avec la Russie, même si, sur le plan personnel, ils n’aiment pas le régime de Poutine. Cela est particulièrement vrai pour l’Europe centrale et orientale, qui souffre le plus à cause des problèmes causés par la guerre. Les personnes défavorisées sont insatisfaites des politiques gouvernementales et quand le gouvernement dit : « Nous devons faire des sacrifices pour la victoire de la démocratie en Ukraine », ils disent (ou pensent) le contraire. L’autre aspect du problème est qu’une autre partie de la société croit de manière acritique à la propagande du gouvernement et est prise au piège du militarisme et du nationalisme. Dans la tentative de résister à la menace venant de l’Est, les gouvernements d’Europe centrale et orientale ressemblent de plus en plus aux régimes russe et biélorusse.

Il nous semble que la classe ouvrière de l’UE vit beaucoup mieux que celle de la région BUR et qu’elle ne pense guère aux travailleur.ses de l’Europe de l’Est. En tout cas, une fois la guerre terminée, les travailleur.ses d’Europe de l’Est auront besoin du soutien et de l’expertise des syndicats d’Europe occidentale, pour résister au capital occidental, qui va sans doute affluer en Ukraine. La question des valeurs des travailleur.ses est importante aussi. Nous ne pensons pas qu’aujourd’hui le prolétariat soit un élément homogène et il n’est certainement pas révolutionnaire. Certainement pas dans notre région. Nous n’idéalisons pas les travailleur.ses, parce que nous voyons que non seulement ils/elles manquent du courage de se battre, mais que leurs buts ne vont pas plus loin que des augmentations des salaires. Nous tou.tes avons encore beaucoup de travail à faire pour promouvoir l’idée de l’auto-organisation des travailleur.ses, la lutte pour un changement des valeurs et pas seulement pour des concessions temporaires. Mais ce sont les travailleur.ses eux/elles-mêmes, et non les élites intellectuelles, qui devraient s’y intéresser.

 

4. Pour la majorité de la gauche social-impérialiste, surtout les Partis communistes, qui dirigent des centaines de syndicats à travers le monde, Poutine devrait être soutenu contre l’Ukraine, car, selon eux, l’Ukraine « lutte au nom de l’OTAN ». Que diriez-vous à ceux qui soutiennent le chacal de toutes les Russies ?

Avant d’attaquer l’Ukraine, les autorités russes ont éliminé toute opposition dans leur pays. Les syndicats indépendants n’existent pas, aucun parti d’opposition n’émerge. Le mouvement anarchiste a été écrasé, les anarchistes ont été torturé.es et emprisonné.es pendant 20 ans (pourtant, pas un seul être humain n’a été tué par des anarchistes). Récemment, un manifestant libéral (Anatoly Berezikov, 35 ans) est mort sous la torture dans une cellule de garde à vue (il a été arrêté pour avoir distribué des tracts).

Le soulèvement biélorusse a été vaincu, les anarchistes, ainsi que les révolutionnaires libéraux, sont en prison ou ont quitté le pays. Pas de syndicats indépendants, pas de partis d’opposition.

Les livres « indésirables » sont retirés des bibliothèques, les sites Internet sont bloqués, il n’y a aucune limite à l’utilisation des technologies de reconnaissance faciale. Les personnes qui osent avoir leur propre opinion ne sont pas autorisées à enseigner dans les écoles ou les universités.

En plus, la population russe (en dehors de Moscou et de Saint-Pétersbourg) est très pauvre. Les histoires de soldats russes qui pillent des télés et des sièges de toilettes comme trophées de guerre ne sont pas une exagération. Le régime augmente sa pression sur les pays dépendants, comme le Kirghizstan et le Kazakhstan, les forçant à livrer les personnes qui y ont trouvé refuge. Maintenant, ils apportent la répression, le contrôle totalitaire, la torture et la mort au peuple ukrainien. Poutine n’est donc en aucun cas un remède aux problèmes des travailleur.ses de l’Ouest. Les partis communistes sont peut-être d’accord avec la répression, mais pas nous. Soutenir Poutine, sous quelque forme que ce soit, est à la fois immoral et insensé dans la pratique.

 

5. Nous avons vu un reportage sur les combattants en Ukraine, fait par un journaliste français, qui était sur le front à partir de mai 2022. Ce reportage montre qu’il y a de vrais révolutionnaires, des anarchistes, certains se disant trotskistes, d’autres se disant communistes libertaires, qui sont en première ligne contre l’invasion de Poutine. Que pensez-vous de ce mouvement de partisans qui sont sur la ligne de front ? Quelles devraient être leurs relations militaires avec l’armée de Kiev ?

Oui, il y a des anarchistes et des libertaires au front. Mais ce n’est pas un mouvement de partisans : ils font partie de l’armée régulière ukrainienne. Dans un premier temps, il y eut une tentative de former une unité anti-autoritaire, organisée sur des principes anarchistes, au sein des Forces de défense territoriale ukrainiennes, mais cela n’a pas duré longtemps. Tout d’abord, ils n’ont pas été autorisés à inviter de nouveaux.elles compas venant de l’étranger et ils ont été tenus à l’écart de la ligne de front ; ensuite la Défense territoriale a été complètement incorporée dans les structures de l’armée. L’organisateur de l’unité anarchiste, Yuri Samoïlenko, a été tué au combat. Maintenant, les anarchistes, Ukrainiens et d’autres pays (y compris Russes), combattent dans différentes unités, où ils essaient de maintenir les principes anarchistes et parlent de leurs idées à leurs camarades d’armes.

Si vous nous demandez notre avis : cela devrait être différent, les anarchistes devraient avoir leurs propres formations militaires et se battre pour leur propre programme. Mais dans la situation actuelle, cela n’est pas réaliste.

 

6. Certains révolutionnaires ont perdu la vie sur le front, en Ukraine, comme votre compagnon Dmitry Petrov. Dans le reportage susmentionné, il affirme qu’une victoire de Poutine serait une lourde défaite pour les travailleur.euses et pour les peuples que la Grande Russie opprime. Il affirme que, au contraire, avec une victoire en Ukraine et des armes dans leurs mains, les travailleur.euses seraient dans une situation imbattable, pour affronter l’impérialisme et le gouvernement de Zelensky. Quelle est votre opinion à ce sujet ?

Nous sommes, dans l’ensemble, d’accord avec Dmitry. À cela, nous voudrions ajouter que tou.tes les anarchistes ukrainien.nes ne combattent pas dans la guerre. Beaucoup d’entre eux/elles préfèrent participer à des structures auto-organisées pour soutenir la population civile et organiser les évacuations et l’approvisionnement. En Ukraine, les mouvements de solidarité et d’entraide organisés par la base sont très forts. Les volontaires jouent un rôle énorme en approvisionnant le front et les civils, en fournissant aux gens de la nourriture et des vêtements, en évacuant les personnes sous le feu, en fournissant une aide médicale. La guerre enseigne aux gens à s’organiser sans le gouvernement et cela aussi donne de l’espoir pour l’avenir.

Nous ne savons pas comment sera l’avenir, mais si l’Ukraine gagne, il y aura un espoir de changements positifs dans tous les domaines de la vie, y compris l’économie. Beaucoup d’efforts iront dans la reconstruction du pays en ruine, il y aura beaucoup de nouveaux emplois et il y aura des capitalistes qui essaieront de s’enrichir avec tout cela. Très probablement, l’Occident commencera à faire tout ce qui est possible pour soumettre autant que possible le pays. Il n’y a pas de doutes que différentes forces politiques s’opposeront à l’émergence du culte de Zelensky et au renforcement du pouvoir du président et de son parti « Serviteur du peuple », parce que, en termes socio-économiques (et non militaires), la politique des élites dirigeantes laisse beaucoup à désirer. Nous espérons vivement qu’il y a aura une purge (y compris par des méthodes radicales) de tous ces parasites. Nous aimerions croire que les gens ordinaires trouveront le soutien des anciens militaires qui ne toléreront pas l’humiliation et l’exploitation. Ils auront de l’expérience de combat, des armes et rien à perdre. C’est-à-dire qu’ils peuvent facilement tourner leurs baïonnettes vers les corrompus et les exploiteurs : les politiciens, les bureaucrates et les hommes d’affaires.

 

7. Quel appel pouvons-nous adresser, même en commun, aux jeunes russe qui, comme on le sait, souvent s’enfuient pour ne pas être enrôlés dans l’armée ou même désertent, une fois au front, et se retrouvent en prison par milliers, pour avoir refusé de combattre ?
Pour notre combat, en Syrie, cette question est une affaire de vie ou de mort, puisqu’il s’agit aujourd’hui de faire de l’agitation à l’arrière-garde d’el-Assad et de Poutine qui le soutient.

Les idées de libre marché, de fascisme, de socialisme de style soviétique ont été complètement compromises. La position de ne rien faire et de laisser aller a conduit à une guerre gigantesque pour les intérêts de la classe dirigeante, dans laquelle on n’est que de la chair à canon. Pourtant, la dignité humaine, l’organisation de la société par le bas, la coopération et en général la reprise du contrôle de sa vie – c’est ce que nous appelons anarchie – ces idées restent fortes. Quoi que vous choisissiez de faire, où que vous soyez – dans l’immigration, en prison, dans un groupe clandestin ou tout simplement en soutenant secrètement la lutte qui se déroule, sous pression – il y a toujours de la place pour de l’anarchie autour de vous.

 

8. Nous sommes très intéressé.es de connaître les conclusions que vous voudriez partager avec nous, après 12 ans de révolution et de contre-révolution en Syrie.

Personne d’entre nous n’a été en Syrie, nous préférons donc laisser cette analyse à celles/ceux qui vivent et luttent là-bas. Par ex. : t.me/azatyutun, www.facebook.com/RewolucjaRojavy/.

 

9. Comme nous l’avons dit auparavant, des camarades anarchistes, comme Giannis Michailidis, Georgia Voulgaris et Thanos Chatziangelou sont en grève de la faim en Grèce. Qu’est-ce que nous pouvons faire ensemble pour lutter pour la libération immédiate et inconditionnelle d’eux/elles tou.tes ?

Il y a de nombreux.ses prisonnier.es anarchistes dans le monde. Voici la liste de l’Anarchist Black Cross pour l’année 2022. En dehors de la Grèce, il y a beaucoup de prisonnier.es anarchistes en Biélorussie et en Russie, certain.es d’entre eux/elles devant purger jusqu’à 20 ans de prison. La libération immédiate et inconditionnelle d’eux/elles tou.tes ne peut être obtenue que par la révolution. Même dans un tel cas, les nouveaux gouvernements peuvent être réticents à libérer des prisonnier.es accusés de crimes « violents ». Ce que nous pouvons faire maintenant, c’est poursuivre leur lutte et populariser leurs actions, pour que les gens connaissent leurs noms et les soutiennent et insistent pour qu’elles/ils soient tou.tes libéré.es quand l’occasion se présentera. Il est aussi très important de rester en contact avec les prisonnier.es pour qu’ils/elles sentent notre soutien et que tous les cas de torture soient connus. Et, bien sûr, s’il y a une occasion de libérer quelqu’un.e par la force, il faut la saisir.

 

10. Aujourd’hui, il y a des luttes en France. En Amérique latine, le réformisme cherche à transformer l’énorme flambée révolutionnaire anti-impérialiste en pièges électoraux. Au Moyen-Orient, le feu de la révolution n’a pas été éteint. Nous avons des relations fraternelles avec les étudiant.es du Zengakuren, au Japon, qui ont marché par milliers contre le G7. Quel message voudriez-vous envoyer à elles/eux tou.tes ?

Nous ne pouvons que souhaiter le succès à tou.tes ceux/celles qui luttent contre l’oppression.

 

11. Nous avons publié de dizaines d’articles, ainsi qu’un livre, sur la question de l’Ukraine, qui est liée aussi àla lutte de la classe ouvrière en Russie. Mais nous savons ce que c’est de se trouver soi-même au milieu d’une guerre, où les mots ne suffisent pas. Que proposez-vous aux courants révolutionnaires du monde, pour lutter ensemble et mener un combat commun dans ces sommets de la lutte des classes, comme en Ukraine ?

Tout d’abord, en Syrie et en Ukraine, les mouvements révolutionnaires doivent acquérir une expérience de combat et essayer de construire leurs propres structures : des milices populaires, des groupes de milices, etc. Créer des réseaux de solidarité avec des gens ordinaires, en leur transmettant les idées de justice sociale, d’auto-organisation d’en bas et d’autogestion des travailleur.euses (comme le font les Solidarity Collectives). Poser maintenant les bases de la démocratie directe, ce qui contribuera à la construction d’une nouvelle société après la guerre. Dans la situation d’aujourd’hui, il nous semble que toutes les forces doivent aller dans la lutte contre l’occupant et seulement après la victoire nous devrons être complètement engagé.es dans un travail créatif actif.

Quant à l’Ukraine, vous devez comprendre que les travailleur.euses ukrainien.nes et la société dans son ensemble ont un traumatisme post-soviétique et que tout ce qui est en quelque sorte associé au « communisme » a été discrédité. Dans une vague d’euphorie anti-russe, non seulement les monuments à Lénine, mais aussi ceux à d’autres personnalités soviétiques, aux soldats, etc., sont démolis et les idées de gauche sont facilement éclipsées par celles néolibérales. De plus, une partie des mouvements communistes, trotskystes et même anarchistes du monde soutient la Russie et ne considère pas le peuple ukrainien comme une entité politique ou alors prend une position dangereusement neutre. Par conséquent, il sera difficile dans l’avenir de redonner du crédit aux valeurs progressistes de liberté, d’égalité, de démocratie directe et d’entraide. Mais nous ferons de notre mieux !

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