Contra Info / mardi 18 janvier 2022
Nous sommes responsables. Sur notre participation aux faits dont on nous accuse, notre prise de responsabilité politique
« Je nie le droit de me juger à tous ceux qui ne comprennent pas la voix de mes désirs, le hurlement de ma nécessité, les envolées de mon esprit, la douleur de mon âme, la palpitation de mes idées et l’angoisse de ma pensée.
Mais tout ça, je suis le seul à le comprendre. Vous voulez me juger ? D’accord ! Mais vous ne jugerez jamais mon véritable moi. Plutôt ce « moi » que vous avez vous-même inventé. Mais pendant que vous penserez de m’avoir entre vos mains pour m’écraser, Je serai en haut, riant au loin ! »
Renzo Novatore*
Nous avons fait notre déposition devant le bien connu procureur… Cela n’a pas été pas facile, du moins pour nous, qui faisons face à un procès de ce type pour la première fois. Nous avons reconnu être les auteurs de l’acte dont nous sommes accusés et nous avons exprimé notre motivation politique et éthique.
Nous avons vu cette action en elle-même comme un passage des mots aux actes, une démonstration de notre critique destructive des institutions qui exercent la violence au nom de l’État.
Nous voulions « provoquer la terreur dans une partie de la population », plus précisément au sein des forces de l’ordre ; il y a plein de raisons pour cela, à commencer par notre tendance politique et idéale, jusqu’à des faits concrets qui ont donné une mauvaise réputation aux Carabineros, qu’il s’agisse de massacres, d’assassinats, de scandales, d’opérations et d’autres cas, publiques ou secrets. Même ainsi, nous pensons que l’acte parle de lui-même et que, même sans la relative revendication, le message aurait été très clair.
Notre démarche a été celle d’une « attaque visant une personne précise ». L’objectif peut sembler capricieux. Nous ne le connaissons pas en personne, mais nous réaffirmons notre choix, en sachant que nous sommes ennemis de toute personne qui, de son propre choix (évidemment), porte un uniforme et est complice du monopole de la violence au nom d’un État, avec l’excuse de l’ordre et du bien commun.
Peut-on considérer que nous collaborons à l’enquête ? Oui, bien sûr, mais avec le plaisir de ne pas nier ni cacher nos principes, en répondant aux questions plus « techniques ». Nous avons expliqué au procureur une partie de ce que nous avons fait en vue de cette action, en indiquant être les auteurs communs ou individuels des tâches que nous avons effectuées.
La seule chose que nous pourrions regretter sont certaines décisions et procédures techniques qui, si elles avaient été prises avec plus de soin, auraient changé notre situation actuelle et les conséquences pour notre présent ; ce qui ne change pas est notre façon d’affronter la taule, qui n’a jamais été celle de victimes.
La responsabilité que nous avons assumée est, à notre avis, totalement et compétemment politique. Nous l’avons assumée ainsi dès le début, indépendamment de la culpabilité ou de l’innocence qu’on aurait voulu nous attribuer avec la sentence.
Comme cela a été exprimé à l’époque par quelques compagnons dans territoire grec, dans une période où il est beaucoup plus facile de défendre des positions victimistes et de parler de montages policiers, en essayant de se décrire comme de pauvres persécutés, nous prenons position à partir du caractère conséquent et de la cohérence radicale de notre pensée et de nos actions, dans l’éternelle tentative de faire de cette vie quelque chose qui ne soit pas simplement végéter et cracher des discours agressifs qui s’épuisent dans le symbolique.
Nous n’avons jamais fait preuve d’une fierté qui nous rendrait aveugles face à nos erreurs. Nous nous savons totalement et complètement imparfaits et toujours ouverts à l’autocritique la plus dure que nous puissions nous infliger, mais ces réflexions seront un trésor que nous garderons pour nous.
Il ne nous reste plus qu’à terminer ces quelques mots en remerciant pour leur soutien inconditionnel nos amours, nos affins et nos amis, libres ou en cage, proches ou lointains, dans cette vie ou dans une autre.
Rien n’est fini…
Des accolades complices à nos frères/sœurs emprisonné.e.s dans les cachots, en Grèce et dans le monde entier. Et un salut spécial et fraternel aux anarchistes biélorusses condamnés en décembre 2021 pour avoir lutté contre la dictature dans ce territoire.
Emprisonné.e.s mais jamais vaincu.e.s !
Liberté pour les prisonnier.e.s subversif.ve.s et anarchistes !
Feu aux prisons et à la société qui en a besoin !
Ignacio et Luis Avaca
* Note d’Attaque : Renzo Novatore, Dell’Individualismo e della Ribellione, publié dans Il Proletario, n°4, 17 septembre 1922. Traduction effectuée depuis l’original italien, qu’on pourra trouver par exemple ici.