France Inter / 1er avril 2021
« À l’heure où tout le monde ou presque travaille/étudie/partage/se détend/s’instruit/s’insurge/fais du sexe/… face à un écran, que ce passerait-il si quelques câbles de fibres optiques sous une trappe faciles d’accès étaient saboté (sic) ? », interroge l’une des tribunes relayées en avril 2020, intitulée « En mai, fais ce qu’il te plaît : un appel au conflit« . Ses auteurs poursuivent : « Nous ne savons absolument pas ce que cela pourrait produire. Et c’est précisément pour cela qu’il faudrait impérativement le tenter ». Un an après le premier de ces appels, qui invitaient à « renouer avec l’Action directe » en s’en prenant à des infrastructures liées aux télécommunications (antennes-relais, câbles de fibre optique,…), 174 de ces équipements ont été pris pour cible en France, selon les informations de France Inter.
Ces textes, attribués par le ministère de l’Intérieur à la mouvance d’ultragauche [pffft… NdAtt.], sont accompagnés de manuels et fascicules détaillant les moyens techniques à mettre en œuvre pour dégrader ou détruire le matériel (dans 52% des cas, les auteurs ont eu recours à des incendies). Ils prodiguent également des conseils afin d’éviter toute interpellation, le premier d’entre eux étant d’agir sur des infrastructures isolées, peu protégées et donc facilement accessibles (là aussi, des guides détaillent les endroits sous vidéosurveillance, ainsi que la localisation des postes de police ou des gendarmeries les plus proches). Cette stratégie explique la forte proportion d’infrastructures visées en milieu rural : 137, soit plus du trois quarts des cibles, alors que seules deux l’ont été dans l’agglomération parisienne. Les départements les plus touchés sont la Haute-Garonne, l’Isère, l’Ardèche, la Drôme et les Bouches-du-Rhône. Ce bilan du ministère de l’Intérieur dit avoir recensé d’importants préjudices liés à ces actions, notamment des coupures de réseau dans de nombreuses communes, ainsi que des conséquences sur le fonctionnement des services jugés d’utilité publique.
En un an, seules 26 personnes ont été interpellées dans le cadre des enquêtes concernant ces sabotages, pour 14 faits. Or, leurs profils montrent que la motivation n’est pas toujours uniquement de mettre hors d’état de fonctionner des équipements soupçonnés d’être un instrument de surveillance et d’asservissement des masses. Au-delà de ces convictions politiques, certains semblent avoir agi par peur de la collecte des données personnelles, par crainte des ondes, par refus de la pollution visuelle, ou en raison de la perte de valeur de leur habitation se trouvant à proximité des infrastructures. Si certaines actions sont directement revendiquées par des groupes associés à l’ultragauche, dans la majorité des cas, leurs sites internet ne font que relayer l’information de ces dégradations.
Le ministère de l’Intérieur note, par ailleurs, un nombre croissant d’actions contre les infrastructures liées à la 5G, qu’il s’agisse des équipements techniques, ou des équipements commerciaux. Cette mobilisation, qualifiée de « large », va de l’opposition apolitique de certains aux mouvements politisés. Alors que les Français font un usage intensif d’internet, en ces temps de confinement et de télétravail, le réseau de la fibre optique est également de plus en plus pris pour cible, notamment en raison de la facilité à y accéder.
Cette situation n’est pas propre à la France, certains groupes allant même jusqu’à échanger leurs « conseils » d’un pays à l’autre. Ainsi, en Europe, la Belgique, l’Italie, les Pays-Bas et le Royaume-Uni ont également été confrontés à une série d’incendies de pylônes de télécommunication lors du printemps 2020.