Hamilton (Canada) : Sur l’irruption homophobe à la Pride, la réponse et la répression

Les homophobes se font chasser de la Pride

Note d’Attaque : le 15 juin se tenait, dans un parc de la ville de Hamiton, au Canada, le Pride. Tout le monde craignait une agression de la part de militants homophobes, comme cela a été la cas lors d’autres Pride, par exemple les villes de Dunville ou de Toronto, ainsi que l’année dernière à Hamiton. Les jours précédents la Pride, les organisateur.e.s ont donc demandé la protection de la police, tandis que des queers se sont organisé.e.s par elleux-mêmes pour se défendre et défendre l’événement. Une grande banderole noire de neuf mètres de large et presque trois de haut, le “Black Hole”, a été prévu pour “cacher” les homophobes avec leurs pancartes. Ça a tourné à la bagarre générale (beaucoup de personnes venues pour la Pride se sont jetées dans la mêlée aux côtés des queers qui s’étaient organisé.e.s contre les réactionnaires, venus, eux, avec protections et objets pouvant servir d’armes) et au final les homophobes ont été chassé du parc.

Quelques extraits d’un compte-rendu

North-Shore.info / mercredi 19 juin 2019

15 juin 2019 : à 14 h, le groupe d’homophobes et de nationalistes blancs qui avaient agressé la Pride a été escorté hors du parc par un groupe de flics, arrivés à la fin de la fête, et par une foule bruyante de queers railleux.ses. Leur visite à la Hamilton Pride 2019 a duré un peu moins d’une heure et a été caractérisée par le comportement les plus conflictuel que nous ayons jamais vus de la part de ces personnes.
Au moment où ils ont quitté le parc, il leur manquait plusieurs de leurs panneaux de trois mètres et demi, deux caméras Go-pro et des protections. Quelques-uns saignaient et se sont probablement réveillés le lendemain avec des yeux au beurre noir et des bleus, mais il semble qu’ils n’aient subi aucune blessure grave. Malheureusement, de notre côté nous ne pouvons pas en dire autant. […]

Le comité organisateur de la Pride n’avait aucun plan pour s’occuper des homophobes. Le comité organisateur de la Pride espérait simplement que les flics s’occuperaient de la situation, et quand cela ne s’est pas produit, ielles ont été trop lâches pour reconnaître ce qui s’était vraiment passé : que plus de 70 queers et allié.e.s ont mis leurs corps en jeu pour affronter les ennemis et, après avoir subi de multiples blessures graves et fait entendre nos voix, les ont démoralisés et les ont repoussés au point qu’ils ont décidé de partir, ce que ces homophobes font rarement.

L’histoire de la Pride 2019 n’est pas celle d’une célébration ordonnée et colorée grâce à la capacité des organisateurs. C’est une histoire d’homophobie brutale et de courage qui inspire l’admiration de la part de la communauté queer. […]

Et si au lieu d’être devant la Pride et de cracher leurs bêtises, [les réacs] étaient obligés de regarder un mur noir pendant toute la journée ?
Alors, on en a construit un. Un « Black Hole » pour faire disparaître les homophobes. Une bannière noire de quatre mètres de large et presque trois de haut, renforcée par sept morceaux de bois. Dans les jours précédents, nous avons renforcé la bannière, parlé des niveaux d’inconfort de ce que chacun.e aurait toléré et nous nous sommes entraîné.e.s à bouger en groupe. Le jour de la Pride, nous avons formé un pink block avec des t-shirt en cagoule, et dès que nous avons appris que les réacs étaient arrivés, nous avons traversé le parc avec notre bannière et rencontré des dizaines d’autres participants à la Pride qui était allé.es à leur rencontre. On a déroulé le “Black Hole” et nous nous sommes placés directement entre les homophobes et la célébration de la Pride. La foule a explosé en applaudissements, parce que ces trous du cul avaient été temporairement effacés. Alors que plusieurs personnes ont affronté directement les réactionnaires quand ils essayaient de nous contourner, notre groupe est resté concentré sur le fait de les bloquer en dehors du festival et de les contenir et garder hors de vue. Nous étions fermes, même insistant.e.s s’ils essayaient de s’approcher trop près, mais, délibérément, nous n’avons pas tapé. Nous voulions voir comment cette tactique marchait. Chacun.e d’entre nous avait convenu que nous n’allions pas chercher la bagarre, mais que nous étions prêt.e.s s’ils en commençaient une.
Ce qui s’est passé pendant l’heure qui a suivi, ce fut un bordel absolu caractérisé par une violence brutale, par de la détermination et de la solidarité spontanée. Une par une, les personnes qui faisaient partie de notre groupe d’affinité initial se sont retrouvées de l’autre côté de la banderole, pour se faire soigner des blessures graves. Quelques-un.e.s d’entre nous ont été frappé.e.s au visage par un maniaque casqué, nommé Christopher Vanderweide, un suprémaciste blanc de Kitchener, Ontario. Un.e membre de notre groupe s’est fait frapper au sol et a reçu un coup de pied à la tête de la part de John Mark Moretti (alias Ylli Radovicka) – un sale type de Toronto qui fait part d’un groupe radical de prédicateurs de rue appelé Servanthoods. […]
En fin de compte, notre tactique d’essayer de tenir le mur noir tout en nous protégeant dans ce combat s’est avérée inefficace pour notre groupe du pink bloc et beaucoup d’entre nous ont dû choisir entre lâcher la bannière ou se battre avec une seule main.
Mais en fin de compte, cela n’a pas d’importance.
Ce qui est important, c’est que lorsque j’ai dû m’éloigner du combat avec une cascade de sang tombant de mon visage, j’ai regardé en arrière et j’ai vu le mur noir toujours debout, tenu par un groupe de personnes, dont certaines que je ne connaissais même pas. Des gens qui comprenaient la valeur de ce que nous essayions de faire, et qui se sont mises en jeu lorsque nous ne pouvions plus tenir.
Le Black Hole est resté intact et debout jusqu’à ce que les homophobes quittent le parc.
Ce qui est important, c’est qu’au lieu de s’asseoir et de demander à la police de nous sauver, un énorme groupe de personnes s’est rassemblé et a posé clairement que la Pride n’est pas un lieu sûr pour les prédicateurs homophobes.
Cette sensation que j’ai ressentie en levant les yeux vers la bannière qui se tenait encore debout a dépassé toute douleur ou peur que j’avais ressentie ce jour-là ou dans les jours suivants. Cette sensation me rend complètement insensible au fait que la police me recherche ou pas, moi ou l’un.e de mes ami.e.s. Ça fait que je n’ai pas peur de ce que les homophobes planifient pour l’année prochaine.
Je vais aller de l’avant et appeler ce sentiment PRIDE [fierté]. Je suis fier.e de ma communauté queer, fier.e de ma communauté anarchiste, peut-être même fier.e de Hamilton dans son ensemble. Nous savons comment prendre soin les uns des autres et nous défendre, même si nous n’avons pas souvent l’occasion de le faire.

Puisque les réacs sont si profondément obsédés par le fait de filmer chaque minute de leur vie pathétique afin de devenir des célébrités sur Youtube, nous avons largement assez de documentation vidéo sur les événements. Des bagarres enregistrées sous plusieurs angles, le bruit brutal d’un casque contre un os enregistré par plusieurs micros. Nous savons ce qui s’est passé. La Pride a été impitoyablement attaquée par un groupe d’hommes homophobes, des gens qui s’étaient dotées de protections et d’armes et qui étaient prêts à frapper les homosexuels qui croisent leur chemin. Nous leur avons tenu tête, nous nous sommes défendu.e.s et nous avons saboté leurs efforts pour passer la journée dans le parc. Quand – après presque une heure d’échauffourées – la police a décidé d’intervenir, il n’y avait plus rien à faire. Les homophobes savaient qu’ils ne pourraient plus tenir longtemps et ils ont apprécié l’escorte policière les accompagnant hors du parc. […]

La communauté queer a trop souvent orienté ses énergies vers des solutions étatiques. Davantage de lois contre les crimes haineux et plus de policiers ne sont pas la solution. Des queers qui veillent les uns sur les autres et qui se renforcent/prennent de l’assurance [building empowerment] sont la solution et l’ont toujours été. Si la police avait été à la Pride cette année, nous n’aurions jamais pu expulser ces réacs du parc. Les flics auraient formé une ligne entre nous et eux, protégé leur « droit à la liberté d’expression » et arrêté tous les queers qui auraient essayer de les chasser. Nous n’aurions jamais été en mesure d’arracher leurs panneaux, d’écraser leurs caméras ou de les repousser de plus de douze mètres de l’endroit où ils ont tenté de protester. En fait, la première chose que la police a faite en arrivant sur les lieux a été de nous forcer à enlever nos masques roses, ce qui nous aurait exposés à l’extrême droite et menacé notre sécurité (certains de nos amis ont déjà été victimes d’une grande violence).
Plus de flics à Pride signifiera toujours une situation plus dangereuse pour nous. C’est pourquoi nous ne pouvons pas nous arrêter à ce que la suite de cette affaire se résume à essayer de « demander des comptes à la police » ou à demander des arrestations ou une protection. La police n’est pas responsables de nous et ils ne sont pas là pour nous protéger. Nous ne devrions jamais préconiser qu’ils aient plus de ressources ou d’autorité. Jamais. Nous n’avons pas besoin que la police fasse quelque chose. Nous avons fait quelque chose. […]”

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La répression frappe les queers : Cedar arreté.e

Note d’Attaque : Suite à l’autodéfense des queers à la Pride, la police de Hamilton a commencé son travail répressif. Pas contre les homophobes, bien entendu, mais contre le milieu anarchiste/queer de la ville. Cedar a été arrêté.e. Ce compagnon.ne était récemment sorti.e de taule, en liberté conditionnelle, suite à la répression qui a suivi l’émeute de Locke Street,

Quelques extraits du communiqué de The Tower, centre social anarchiste de Hamilton :

North-Shore.info / lundi 24 juin 2019

[…] Mais voici les faits : Cedar Hopperton n’était pas à la Hamilton Pride. Ielle n’étaient pas masqué.e, ielle n’était pas là à tenir un panneau et ielle n’a pas été impliqué.e dans les affrontements. Ielle n’était pas là du tout. Ielle n’étaient pas près de Gage Park ce jour-là. Au lieu de cela, ielle est resté.e à la maison et a offert son soutien à celleux qui ont quitté le parc ensanglanté.e.s, battu.e.s et secoué.e.s. Comme les journaux l’ont rapporté, ielle a fait des déclarations en soutien de celleux qui ont défendu la Pride, lors d’une réunion du comité LGBTQ, quelques jours après. Debout sur un piédestal à l’hôtel de ville, Cedar a maintenu que la police ne fait pas et ne devra jamais faire partie de la communauté queer et ielle a applaudi celleux qui, à la Pride, se sont défendu.e.s par elleux-mêmes face à l’agression. L’arrestation de Cedar est une représailles claire et calculée pour ces déclarations, ainsi qu’une tentative de brouiller les cartes en assimilant ce qui s’est passé à la Pride à ce qui s’est passé à Locke Street l’année dernière. […]

Malgré le fait qu’ielle n’étaient pas à Pride, Cedar pourrait passer des semaines en prison en attendant une audience de libération conditionnelle afin de faire valoir sa cause. Pour accélérer ce processus et faire pression sur la police de Hamilton, Cedar a commencé une grève de la faim. Pour l’instant, nous n’avons pas d’autres détails, mais nous savons que depuis son arrestation samedi matin [le 22 juin; NdAtt.], Cedar n’a rien mangé. Il faut se mobiliser autour de cette affaire, aider à relayer les infos et s’assurer que le cas de Cedar ne se perde pas dans le flux hebdomadaire des nouvelles.
Pour être clair, il ne s’agit pas de l' »innocence » de Cedar en soi. Nous savons que le mot « criminel » n’est utilisé que pour dévaloriser les actions ou l’humanité de quelqu’un.e, et nous ne croyons pas qu’enfreindre une loi rend quelqu’un bon ou mauvais. Nous publions cette déclaration parce que nous estimons qu’il est important de le dire publiquement : l’affirmation que Cedar a été impliqué.e dans les événements de la Hamilton Pride est catégoriquement fausse et non fondée. En même temps, cela ne veut pas dire que d’autres queers qui pourraient être arrêté.e.s devraient être soutenu.e.s sur la base de leur innocence. Ce que les gens ont fait ce jour-là à Pride, c’était de la légitime défense et ils ne méritent pas d’être arrêté.e.s. Nous devons en vouloir à la police d’avoir faussement accusé Cedar ET d’avoir pris pour cible celleux qui étaient là et qui ont essayé de protéger notre communauté.
La police l’a dit à plusieurs reprises aux médias, ils n’ont pas fini. Presque certainement, ils arrêteront d’autres personnes qui ont participé à la défense de Pride, avec ou sans preuves. […]

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