Indymedia Nantes / mardi 4 septembre 2018
En partant de l’évidence de l’économie, la critique marxiste décrypte peut-être le fonctionnement du système de l’économie politique, mais en même temps, il le reproduit comme un modèle. Il n’y a pas de mode de production, ni de production dans les sociétés primitives. Il n’y a pas de dialectique ni d’inconscient dans les sociétés primitives.
Le marxisme est la projection de la lutte des classes et du mode de production sur toute l’Histoire; il est la vision d’une « liberté » future basée sur la domination consciente de la nature. Ce sont-là des extrapolations de l’économie. Dans la mesure où elle n’est pas radicale, la critique marxiste est vouée malgré elle à reproduire les racines du système de l’économie politique.
– Le miroir de la production
Le gauchisme n’est pas seulement mortel de par sa monotonie, il est littéralement mortel dans sa pratique et sa mise en œuvre. Au XXème siècle, l’Union Soviétique a massacré près de vingt à quarante millions de personnes lors de la création de son empire communiste (certaines estimations dépassent les cinquante millions, mais sont difficilement vérifiables car lorsque les personnes étaient envoyées dans les camps, les soviétiques effaçaient souvent toutes traces de leur existence) ; le « Grand Bond en avant » de Mao Tsé-Toung en Chine (largement reconnu comme la plus grande catastrophe causée dans la tentative de construire une économie centralisée) aurait fait environ quarante millions de morts ; et les Khmers rouges cambodgiens ont massacré deux millions de personnes (un quart de la population cambodgienne) dans les Champs de la Mort – au nom d’une « forme égalitaire du communisme ». Les régimes communistes du siècle dernier ont tous eu une évolution incontrôlée et leurs utopies scientifiquement conçues ont toutes finies sous la forme de camps de la mort. En substance, le communisme n’est qu’une autre forme de gestion (particulièrement violente) de la civilisation – à l’instar du féodalisme – et est dévoué à un modèle social industriel basé sur la production avec une ferveur encore plus religieuse que le capitalisme.
Alors on pourrait penser que les anarchistes, plus que quiconque, seraient hostiles au caractère intrinsèquement totalitaire et collectivisant des idéologies gauchistes – comme le communisme et le socialisme – mais à ce jour, un grand nombre de prétendus anarchistes continuent d’exprimer leur sympathie envers les objectifs et l’épistémologie communistes, et l’analyse de classe marxiste – et se laissent embobiner et tromper par des euphémismes comme « communiste anti-étatique », « marxiste autonome », ou encore le préféré du moment du hispter urbain : « communisation ». Les anarchistes qui s’extasient devant ces conneries vénèrent l’autel d’une mare stagnante et restent attachés à une tradition politique d’autoritarisme et de charniers – quelle que soit la terminologie mise à jour ( la fine rhétorique de la « communisation » a atteint de nouveaux sommets d’ennui avec les écrits tendances des fumistes hypocrites comme Tiqqun et les gargouillements imbéciles de Applied Nonexistence : tous deux des groupes de cocos fourbes qui se spécialisent dans le charabia postmoderne, en substituant le langage élitiste et masturbatoire à la parole réelle, et en étouffant les malheureux lecteurs avec un air fétide et sans rêve – un peu comme comme celui qui s’échappe des poubelles sans couvercle).
Nous sommes depuis longtemps fatigués par ce dialogue et cherchons à donner de nouvelles combinaisons de couleurs anarchiques aux déchets politiques qui engloutissent nos vies. Le verbiage fallacieux de la Gauche a trop longtemps étouffé notre imaginaire, en gelant notre énergie et en dissimulant l’essence de la lutte pour l’Anarchie, ses qualités fondamentales et intrinsèques, derrière des idéologies factices et prétentieuses qui étouffent l’action de la pensée et du rêve dans une attente pénible et unidimensionnelle. Toutes les idéologies sont des entraves à l’Esprit Libre, mais les idéologies qui ne reflètent pas le chaos, l’absurde fantaisie et le rire hystérique de la vie – comme le gauchisme – sont des entraves particulièrement ennuyantes pour l’expression incontrôlée de la rébellion autonome et sauvage. L’Anarchie verte – ou la critique de la civilisation – est une analyse de classe qui ne fait pas les choses à moitié, qui ne reste pas piégée dans la logique capitaliste (comme c’est le cas du communisme) et qui attaque l’aliénation, la domestication et la division du travail à leurs racines… A leurs racines civilisées. La gauche est profondément ancrée dans l’ordre civilisé, et tant que nous lutterons contre cette horrible obscurité empoisonnée qui nous entraîne vers un effondrement universel, il nous incombe de lutter les yeux ouverts.
Warzone Distro, 2018