Paris-luttes.info / samedi 13 septembre 2014
La Défense : le Parisien, partenaire de la nouvelle offensive publicitaire de Decaux. De nouveaux panneaux vidéo publicitaires haute définition viennent d’être installés dans le quartier d’affaires. Pour le quotidien parisien, de simples supports d’information culturelle. Du publireportage, ça en a le goût et la couleur, mais il manque le petit logo ad hoc. On apprend dans les colonnes du Parisien que le géant de l’écran publicitaire et de la bicyclette de surveillance JCDecaux vient fort sympathiquement d’équiper le parvis de la Défense de « 55 écrans pour ne plus rien rater dans le quartier ».
La directrice générale de Defacto, Marie-Célie Guillaume, s’est réjouie de voir enfin cet équipement en place : « La Défense est un endroit gigantesque où il est difficile de communiquer. Dorénavant, nous pourrons mettre en temps réel des informations sur les événements, ou des alertes de dernière minute. Le but, c’est de montrer que c’est un quartier où on travaille mais aussi où il y a de l’échange. »
Il faut dire que dans un espace aussi inhumain que le quartier d’affaires, les échanges ne sont pas la chose la plus facile. En réalité, derrière le contrat signé entre JCDecaux et l’établissement de gestion du ghetto pour costards-cravates-tailleurs, se cache une nouvelle offensive publicitaire « innovante ». Et pas besoin de faire une grande enquête d’investigation pour le savoir. C’est le baron de la 4×3 qui le précise lui-même sur son site dans une vidéo promotionnelle de son mobilier urbain « révolutionnaire », censé, pour Le Parisien, favoriser la communication avec « les usagers » en leur donnant des infos sur le quartier.
Mais les marques ne seront pas seules à vous imposer leurs messages. Les gentils « usagers » auront aussi droit à de sympathiques conseils des gestionnaires de la Défense qui se prennent pour Big Brother.
D’après l’appel d’offres, les messages diffusés seront effectivement mixtes : la moitié de pure publicité [1], la moitié d’autopromotion choisie par le gestionnaire de La Défense. Le tout matraqué sur près de 140 m2 d’écrans haute définition sans compter les panneaux plus classiques posés dans la foulée, et plantés là pour 15 ans :
50 écrans digitaux 2 m2, 2 Digital Giant MUPI 8 m2 et 3 Giant MUPI Toile 8 m2 rétroéclairés ont ainsi été installés sur le parvis de La Défense, complétés par 3 Digital Giant MUPI 8 m2 et 7 Giant MUPI Toile 8 m2 rétroéclairés sur le boulevard circulaire, le tout représentant un total de 55 écrans digitaux et 111 faces analogiques.
Et dans la gare, c’est carrément un gigantesque écran publicitaire de 7 m de long par 4 de haut, soit 28 m2, qui sera installé prochainement. À un endroit difficilement évitable : en plein milieu du panneau d’affichage des trains.
Ce serait une erreur de ne voir dans ces nouveaux supports digitaux qu’un prolongement de l’affiche dans un abribus ou sur une « sucette Decaux ». Ce qui se joue-là, c’est la « smart city », l’interconnexion permanente entre d’un côté les gestionnaires de l’espace public et les publicitaires, et de l’autre, les publics visés.
D’autres petits écrans équipent La Défense. Mais, situés dans le centre de supervision, ils ne sont pas accessibles au public. Pas moins de 181 caméras dernier cri scrutent en effet l’ensemble des espaces publics (1000 autres s’occupent des parkings, d’autres des espaces commerciaux). Peu sont encore référencées sur Paris.sous-surveillance.net. Celles et ceux qui souhaiteraient s’organiser pour éteindre ces écrans devront donc faire attention. La tactique de certaines personnes opposées à la surveillance, comme à Bruxelles, donne en tout cas des pistes.
En attendant, Jean-Claude Decaux espère bien installer son matos de propagande dans d’autres quartiers. La 16e personne la plus riche de France [2], dont la fortune de plus de 4 milliards d’euros a augmenté de 33% l’année dernière, peut compter sur le soutien du Parisien.
Notes
[1] Publicité dont les bénéfices vont bien évidemment dans les poches de Decaux, selon sa méthode qui l’a fait nabab, en plus des sous versés par l’établissement public, pour l’implantation comme pour la maintenance. Un modèle éprouvé comme les dirigeants le clament eux-mêmes :
C’est en 1964 que notre père, Jean-Claude Decaux, a inventé l’abribus publicitaire. 50 ans plus tard, le succès de JCDecaux repose toujours sur le modèle économique fondateur : installer gratuitement du mobilier urbain dans les villes en échange de l’exclusivité de son exploitation publicitaire. Désormais présent dans plus de 60 pays, le Groupe a su anticiper les évolutions de modes de vie et proposer aux villes, aux autorités de transports et aux aéroports une gamme complète de produits et de services, adaptée aux besoins des citoyens et des annonceurs : abribus publicitaires, MUPI, PISA, Senior, sanitaires à entretien automatique, journaux électroniques d’information, bornes de propreté, vélos en libre-service… http://www.jcdecaux.com/fr/Le-group…
[2] 11e d’après Forbes, et 220e au niveau mondial.
P.S. et si quelqu’un.e voulait s’en prendre à JCDecaux, voilà quelques exemples (et d’autres raisons encore):
http://attaque.noblogs.org/?s=jcdecaux