NdAtt. : Un journaliste est payé pour écrire. Il n’est pas forcement intéressé par le sujet de ses articles et des fois en a une connaissance plus que superficielle. Il est donc parfois moins intéressant de lire ce qu’un journaliste écrit que de savoir dans quel sens hurle la meute de chacals.
Dernièrement, certains d’entre eux ont écrit à propos de ce qu’ils appellent « l’ultragauche ». Ce ne sont que des foutaises glanées sur google ou devant des machines à café de commissariat, bien entendu. Mais ce qui pourrait être intéressant n’est justement pas ce que ces larbins du pouvoir disent, mais précisément ce qu’ils veulent que les gens pensent. Préparent-ils peut-être le terrain à leur potes en bleu?
Des nombreuses belles attaques ont eu lieu un peu partout en France, ces derniers mois. Un nouveau souffle parcourt des milieux subversifs trop sclérosés. Les anarchistes (et les révolutionnaires en général) sont malheureusement encore loin d’être une menace pour cette société. Mais quelque chose de bien réel est en train de naître et de se développer. La possibilité de l’attaque destructrice comme pratique diffuse commence à sortir de l’imaginaire pour prendre corps.
Les appareils répressifs de l’État s’activent, les médias leur préparent le terrain en construisant la figure de l’énième ennemi intérieur. Rien de nouveau, rien de quoi s’inquiéter outre mesure.
Que l’envie de faire tomber ce monde pourri continue à se concrétiser de mille et une manières. Que les noctambules continuent à défier la résignation, que milles feux continuent à brûler sous les ciels étoilés.
Que l’anarchie redevienne une menace pour ce monde.
Voici donc un petit recueil d’articles de presse de ces derniers mois au sujet des méchants de l' »ultragauche ».
Inquiétante ultra gauche
Le Parisien / jeudi 19 octobre 2017
Ne pas attiser les braises
Les mots ont un sens. Lorsqu’une organisation syndicale déclare ouverte « la chasse au DRH », comme ce fut le cas la semaine dernière à l’occasion d’un congrès des directeurs des ressources humaines, il ne faut pas s’étonner des incidents qui s’ensuivent. De longue date, les services de renseignement travaillent sur une nébuleuse d’ultragauche française. Une mouvance composée de quelques centaines d’activistes qui n’agissent que sporadiquement. Des actions parfois très violentes, mais
qui n’ont heureusement pas eu de conséquences irréversibles depuis très longtemps. Lorsque l’on sait qu’une bonne partie de ces militants est composée de lycéens ou d’étudiants, certains leadeurs d’opinion seraient bien inspirés de ne pas attiser les braises… et les haines. La semaine dernière, le syndicat à l’origine du rassemblement anti-DRH a fait savoir qu’il n’était pas impliqué dans les débordements. Un peu facile.
Les militants de l’ultragauche seraient 2 000 en France, selon les policiers, qui qualifient la menace de sérieuse.
« LA NÉBULEUSE. » C’est ainsi que les membres des forces de l’ordre désignent les groupuscules de l’ultragauche.
Et cette appellation générique n’est pas pour déplaire à ces activistes. Depuis le printemps 2016 et la loi El Khomri, une nouvelle génération — jeune, peu structurée, mais bien organisée — occupe le haut du pavé, théorisant le recours à la violence pour faire aboutir ses combats : soutien aux immigrés, lutte contre les prisons et contre le CAC 40. « Toutes les raisons de faire une révolution sont là, écrivent les auteurs du collectif le Comité invisible*.
Le naufrage de la politique, l’arrogance des riches, la misère galopante, l’apocalypse écologique… »
Cet automne, un cap a été franchi avec des incendies de garages appartenant à la gendarmerie à Limoges (Haute-Vienne) et à Grenoble (Isère), revendiqués par des groupes libertaires, en soutien à des militants jugés à Paris pour l’incendie d’une voiture de police avec deux fonctionnaires à bord. Enfin, la semaine dernière, il y eut cette « chasse au DRH » dans le bois de Boulogne, lancée comme une mauvaise blague, qui aurait pu très mal tourner (trois voitures incendiées).
Autant de raisons pour lesquelles le renseignement intérieur tient l’ultragauche pour une « menace inquiétante ». « L’ultragauche n’a jamais disparu, ce sont les services de renseignement qui s’y intéressent à nouveau, commente un autonome de 35 ans, très actif dans le passé. Le grand capital a toujours eu peur de l’ultragauche, à plus forte raison quand il est indécent comme aujourd’hui. »
DE PLUS EN PLUS DE FEMMES
Le profil de ces « révolutionnaires » évolue. « Jusqu’à la loi El Khomri, nous avions affaire à des individus âgés entre 30 et 40 ans, marginaux sans trop de ressources, constate une source policière. Depuis l’an dernier, on assiste à une diversification des origines sociales avec une prédominance de militants issus des classes moyennes », notamment des lycéens et des étudiants.
Autre phénomène nouveau : la montée en puissance des femmes.
DE PARIS À LA CORRÈZE
La « nébuleuse » est plus visible. Estelle plus fournie qu’au début des années 2000 ? Pas forcément. En France, ils seraient environ 2 000. Le réseau informel dit des antifas (pour antifascistes) a gagné en consistance depuis la mort de l’un des siens, Clément Méric, dans un combat de rue avec des skinheads d’ultradroite en 2013. Le noyau dur des Mili, pour Mouvement interluttes indépendant, cercle plus fermé, agrégerait à Paris « une trentaine d’activistes ». Il faut compter aussi avec les autonomes, qui se surnomment entre eux les « totos », et les « zadistes », qui occupent des grands lieux de « résistance », hier Sivens en Haute-Garonne, aujourd’hui, Notre Dame-des-Landes (Loire- Atlantique) et le futur centre d’enfouissement des déchets nucléaires à Bure (Meuse).
Le gros contingent vient de la région nantaise. Cinq squats d’activistes sont recensés en Ile-de-France, dans l’est de la capitale, notamment à Ménilmontant où, le soir de l’élection d’Emmanuel Macron, quelque 700 militants étaient prêts à en découdre. A Rennes (Ille-et-Vilaine), le noyau dur regrouperait une centaine de personnes autour de quelques squats. A Lyon (Rhône), de 100 à 150. A Rouen (Seine- Maritime), 70. Une cinquantaine à Dijon (Côte-d’Or). Et, bien sûr, il faut aussi compter avec Toulouse (Haute-Garonne) « la rouge ». Enfin, d’autres groupes se fédèrent dans les zones rurales, en Corrèze.
Tous refusent les carcans organisationnels au profit d’un fonctionnement horizontal, débarrassé de leadeur, même si des figures émergent. Parmi elles, Julien Coupat, 43 ans, considéré par les policiers comme l’âme du groupe dit de Tarnac (Corrèze), proche du Comité invisible, qui doit être jugé l’année prochaine, soupçonné d’avoir saboté des lignes TGV en novembre 2008, ce qu’il conteste. « Il arrive désormais aux manifs en taxi, pour des raisons de confort et pour déjouer les surveillances », relate une source policière.
« La police a besoin de trouver une tête de Turc, et les médias une figure pour incarner un mouvement qui leur échappe », ironise un autonome en relativisant l’influence de Coupat.
LA STRATÉGIE DU BLACK BLOC
Les militants d’ultragauche, qui ont recours aux messageries cryptées pour se fixer rendez-vous, revendiquent le recours à la violence — ces « 50 nuances de bris » — comme moyen d’abattre l’Etat, mais aussi de fédérer une
contre-société. D’où le fameux Black Bloc, qui définit une stratégie d’action. Dissimulation de matériel (cocktail Molotov, barres de fer…) lors du parcours, dans des véhicules, marteau caché dans un sac à dos, changement de tenues à l’abri d’une banderole… Le « bloc noir » se mêle aux manifestants pacifiques pour s’en prendre aux forces
de l’ordre (le 1er mai dernier, un CRS était transformé en torche vivante) ou aux banques (le 10 octobre, les façades d’agences de la Bred et d’HSBC en faisaient les frais).
Ces nouveaux modes d’action ont amené les autorités à revoir leurs stratégies d’intervention. « Nous tirons les leçons de chaque manifestation, nous confie le préfet de police de Paris, Michel Delpuech. Il s’agit de placer policiers et gendarmes à distance, pour éviter que les forces de l’ordre soient prises à partie. Je ne veux pas de cibles humaines devant des cibles institutionnelles. Mais, en cas d’incidents, CRS et gendarmes mobiles interviennent immédiatement — en tenue — pour éviter toute ambiguïté. »
Les services de renseignement notent aussi l’augmentation d’actions contre des grandes entreprises (Engie, Areva, Suez, Bolloré…), visant à saboter les projets jugés antiécologiques.
Les cibles sont aussi politiques : les permanences des partis sont régulièrement visées. L’ultragauche s’inscrit en dehors du champ démocratique, affrontant les services d’ordre des centrales syndicales. Durant le meeting de Jean-Luc Mélenchon, le 23 septembre, des militants encagoulés ont tenté de s’approprier la scène. « Mort à la politique ! » hurlent-ils.
Faut-il craindre un basculement vers le terrorisme de type Action directe comme dans les années 1980 ?
« Le passage à la clandestinité et le financement de la cause par des actions criminelles constituent un point de non-retour, analyse un cadre du renseignement.
Ce cap n’a, pour l’heure, pas été franchi. »
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« Une volonté d’aller au contact des forces de l’ordre. » Interview de Serge Cosseron:
Qu’entend-on par ultragauche ?
SERGE COSSERON. C’est un mot-valise popularisé par Michèle Alliot-Marie après l’affaire de Tarnac en 2008. C’est sous cette appellation que l’on regroupe les mouvements d’extrême gauche nés après Mai 68 et qui refusent le principe de toute organisation centralisée. Par nature, ils ne sont affiliés à aucun parti. Ils sont dans une logique
libertaire, d’inspiration anarchiste, avec un usage de la violence dénonciatrice. Ce sont des mouvements dont les membres se rassemblent par affinités et privilégient les actions locales. Ils ne sont pas dans la théorie,
mais dans la lutte sur des projets précis.
Comme les zadistes, par exemple ?
Tout à fait. On est sur un modèle d’engagement total, de « forme de vie » comme l’évoque le collectif Comité invisible. Il ne s’agit pas de mener une campagne de dénonciation classique contre tel ou tel projet, ni de faire de la politique, mais d’engager toute son existence dans la militance.
Peut-on parler d’une résurgence de l’ultragauche ?
C’est une mouvance qui a une histoire. Dans les années 1970, on a connu des grands mouvements, comme l’occupation du plateau du Larzac ou la grève des Lip, au sein desquels certaines franges autonomes avaient vu le jour, mais sans qu’elles soient majoritaires. Les années 1980 et 1990 ont été marquées par une mise en sommeil. La mobilisation est repartie dans le sillage de l’altermondialisme. Avec la crise et la précarisation de la société, on assiste à une extension des luttes. C’est difficile à quantifier, mais il y a, en ce moment, un réel développement du courant libertaire : les publications se développent, de nouveaux groupes apparaissent, certains syndicats mettent en avant des modes d’actions plus agressifs…
Existe-t-il un lien entre cette résurgence et le bouleversement de l’offre politique traditionnelle ?
Pas du tout. Ils refusent d’être connectés avec toutes les forces qui participent au système.
Quel est le profil des militants ?
Ils sont issus des franges les plus dynamiques de la société. Ce sont surtout des jeunes, mais plutôt précaires. Les enfants de la 2e et 3e générations d’immigrés sont, en revanche, peu nombreux.
Peut-on parler de menace ?
Pour l’ordre public, oui, dans la mesure où ils commettent des dégradations et où ils ont une volonté très claire d’aller au contact des forces de l’ordre. Mais ce serait stupide de faire des comparaisons avec les attentats anarchistes de la fin du XIXe siècle ou l e s mouvements terroristes des années 1970.
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Pylones compteurs électriques, voitures incendiées
PARMI LES CIBLES de la mouvance d’ultragauche est apparue récemment la société
Enedis (ex-ERDF), qui gère le réseau et la distribution d’électricité en France. Six incendies et des tentatives d’incendie ont été commis sur des pylônes électriques ou des relais de téléphonie, entre le 10 février et le 5 septembre dernier dans la Drôme, l’Ardèche, le Pas-de-Calais, le Gard et le Tarn. Au total, le préjudice se monte à 1 M€ pour Enedis et deux sociétés de télécom.
A Grenoble (Isère), onze véhicules sont incendiés fin mai et les locaux de la société à Crest (Drôme) partent en fumée le 8 juin. Enedis déplore aussi des attaques en région parisienne.
« Plusieurs voitures de cette société ont été incendiées et des portails dégradés, précise un policier parisien. Mais nous ne disposons pas de chiffre précis parce que ces faits sont dilués dans les statistiques des dégradations sans connotation politique. » Le fournisseur d’électricité confirme, qu’entre mai et août 2017, seize véhicules ont été la cible d’incendies dans tout le pays, vraisemblablement criminels pour lesquels il a déposé plainte. « Au-delà du préjudice financier, regrette-t-il. Ces faits sont autant d’atteintes à notre capacité opérationnelle de remplir ses missions de service public. »
Les militants de l’ultragauche reprochent principalement au fournisseur d’électricité d’installer des compteurs intelligents qui relèvent automatiquement la consommation des clients, ce qui évite à un employé de venir faire un relevé à leurs domiciles. « Le pays compte un certain nombre d’opposants à ce système qui estiment qu’il s’agit d’une intrusion dans la vie privée des usagers, explique une source proche du renseignement. Ces activistes associent la luttre contre Enedis au combat contre l’énergie nucléaire et à la lutte contre les nuisances provoquées par les ondes. » Pour l’heure, aucune arrestation n’a été réalisée dans la mouvance anarchiste dans ces différents dossiers.
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Grenoble, un concentré d’actions violentes
EN AUVERGNE – RHÔNE-ALPES, et principalement dans la région grenobloise, les actions de l’ultragauche
se sont multipliées cette année. Le 21 mars, à Grenoble, le siège des Républicains est saccagé, les murs maculés de peinture. Les auteurs disent avoir voulu exprimer leur « dégoût » de la politique et le rejet des partis, « sentinelles d’un ordre marchand ».
Le 23 mars, sept véhicules sont incendiés dans la capitale des Alpes. Trois appartiennent au centre communal d’action sociale (CCAS), accusé de « cogérer la misère ». Le 28 mars, sept véhicules de Grenoble Métropole sont à leur tour incendiés, au nom de « la lutte contre les sites de stockage et d’exploitation de la ressource humaine ».
Le 11 avril, 185 distributeurs et valideurs de tickets du réseau de tramway de l’agglomération sont sabotés. Sur les vitres des stations visées, on peut lire : « Ne validez jamais », « 100 % free », « Nos trajets ne sont pas des marchandises ». Les 15 juin et 18 juillet, des émetteurs et des antennes-relais de TDF sont incendiés
à Piégros-la-Clastre (Drôme) et Saint-Laurent-sous- Coiron (Ardèche). Des milliers de foyers sont privés de TNT, des abonnés SFR de téléphone.
Le 21 septembre, un nouveau cap est franchi : un bâtiment de la gendarmerie de Grenoble est incendié en pleine nuit. 35 véhicules sont détruits. Les dégâts s’élèvent à 2 M€. Une action liée au procès en cours des incendiaires d’une voiture de police à Paris en 2016. « Quelle que soit l’issue du procès, on continuera à s’en prendre à la police et la justice. Notre hostilité est un feu qui se propage », est-il indiqué dans la revendication mise en ligne sur le site libertaire Indymedia.org.
Policiers, gendarmes et magistrats s’inquiètent de la montée en puissance de ce groupuscule « anarcho-libertaire » qui compterait une cinquantaine de membres à Grenoble. « En s’attaquant à la gendarmerie, on voit qu’ils sont prêts à aller de plus en plus loin. Un jour, une de leur action risque de déraper et de provoquer une ou plusieurs victimes », confie un policier.
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Dix nouvelles cibles dans le viseur des anarchistes.
Avant les gendarmeries de grenoble et Limoges, des pylones électriques avaient été incendiés.
Aujourd’hui en France / vendredi 29 septembre 2017 (la page en PDF ici)
Près d’une semaine après l’incendie qui a dévasté le laboratoire et quarante véhicules de la gendarmerie à Grenoble (Isère), l’enquête s’oriente, aujourd’hui, vers un mouvement anarchiste dit d’ultragauche qui multiplie les attaques en France depuis février. Les militaires ont recensé dix nouvelles cibles, grandes entreprises de télécommunications, municipalités et bâtiments du ministère de l’Intérieur, qui pourraient faire l’objet d’attaques dans les prochaines semaines.
Vers 3 h 30 du matin, le 21 septembre à Grenoble, un ou des inconnus entrent dans l’enceinte de la caserne Offner en coupant le grillage. Ils incendient deux voitures garées près du garage de la caserne. Rapidement, le feu se propage aux locaux techniques mitoyens avant d’être maîtrisé vers 6 h 30. Le préjudice se monte à 3 M€. Les enquêteurs
font le lien avec un autre incendie criminel, survenu dans la nuit du 18 au 19 septembre à Limoges (Haute-Vienne). Un bus et quatre fourgons de gendarmerie avaient été détruits par les flammes dans l’enceinte du groupement.
Grâce aux revendications de ces activistes, les enquêteurs relient ces deux affaires avec six incendies et des tentatives d’incendie, commis sur des pylônes électriques entre le 10 février et le 5 septembre dans la Drôme, l’Ardèche, le Pas-de-Calais, le Gard et le Tarn. Au total, le préjudice se monte à 1 M€ pour Enedis et deux sociétés de télécom.
DES OPÉRATIONS REVENDIQUÉES SUR INTERNET
« Nous avons identifié un mode opératoire identique, explique une source proche de l’affaire. Les activistes utilisent des engins incendiaires, ne disposent que de peu de moyens et souvent échouent parce qu’ils sont incapables de forcer une porte. » Pour garantir leur sécurité, les anarchistes ne mettent pas en place d’organisation formelle, précise une source proche du renseignement. Chaque groupe de militants décide par lui-même de passer à l’action.
Leurs opérations ont été revendiquées sur les sites Internet Indymedia et Attaque, qui ont la particularité de publier sans filtre et de manière anonyme les textes des militants de
l’ultragauche.
« Tout a commencé par des appels des anarchistes italiens contre la répression menée par l’Etat qui ont été entendus par les activistes français, précise une source proche du dossier. Ils ont ensuite étendu leurs revendications à la lutte contre la domestication des hommes, contre le capitalisme et contre l’espionnage dû à la communication. »
Et après l’incendie de l’Isère, une revendication a été publiée, en solidarité avec les huit prévenus qui comparaissaient devant le tribunal correctionnel de Paris pour l’attaque et l’incendie d’une voiture de police, en mai 2016 à Paris, lors des manifestations contre la loi Travail.
Toutes les procédures sont recensées par le parquet de Valence (Drôme) mais restent dans les juridictions locales et des enquêteurs de différentes sections ou brigades de recherches se chargent des faits qui les concernent.
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Indymedia, plate-forme anarcho-libertaire et tribune «anti-flic»
Le Parisien / Vendredi 22 septembre 2017
C’est sur ce réseau affilié à la gauche radicale qu’a été revendiqué l’incendie ayant ravagé des locaux de la caserne de gendarmerie de Grenoble dans la nuit de mercredi à jeudi.
«Ne haïssez pas les médias, devenez les médias». Sous ce slogan, Indymedia (IMC), l’une des plates-formes Internet les plus fréquentées de l’extrême-gauche à travers le monde. Créé en 1999 à Seattle par les mouvances altermondialistes, ce réseau libertaire hébergeant une centaine de médias locaux vient de refaire surface dans l’actualité française. C’est depuis ses pages qu’ont en effet été revendiquées les deux récentes attaques contre les forces de l’ordre.
Cinq véhicules de la gendarmerie de Limoges (Vienne) ont été brûlés dans la nuit de lundi à mardi, puis des locaux techniques de la caserne de gendarmerie grenobloise de Vigny Musset (Isère) ont été incendiés deux nuits plus tard. Cette «vague», comme ses auteurs l’appellent, est une réponse au très médiatisé procès du quai de Valmy, lancé mercredi. Neuf manifestants anti-loi travail y sont poursuivis pour avoir participé, de près ou de loin, à l’attaque contre une voiture de police à Paris en mai 2016 et dont les images en flammes étaient devenue virales.
Zero contrôle en amont
«Quelle que soit l’issue du procès, on continuera à s’en prendre à la police et à la justice. Notre hostilité est un feu qui se propage», assure le texte de ces «nocturnes» publié jeudi. Le lendemain soir, face aux menaces de blocage et de dé-référencement de l’Office Central de Lutte contre la Criminalité liée aux Technologies de l’Information et de la Communication (OCLCTIC) pour «provocation à des actes de terrorisme ou apologie de tels actes», la publication a été retirée par les antennes grenobloises et nantaise.
«Nous ne voulons pas savoir qui sont les auteurs de tous les attentats qui sont revendiqués sur le site», expliquent les gérants à leurs utilisateurs, relaie Libération. Là réside justement toute l’ambiguïté d’Indymedia, qui se pose en courroie de transmission, en simple canal pour les militants «de gauche et anarchistes», et non en média. Née de la rencontre de vidéo-activistes nord-américains avec la mouvance anarchiste, cette plate-forme repose sur le principe de l’«open publishing» -une publication libre et ouverte à tous, qui mêle texte, photo, sons et vidéos. Aussi simple que l’envoi d’un mail, on y organise des rassemblements, dénonce des actions des forces de l’ordre ou confectionne des revues de presse.
«De facto, Indymedia publie, sans contrôle éditorial ex-ante (au préalable, ndlr), l’ensemble des contenus qui lui sont soumis et envisage cette opportunité comme une chance pour que se constitue un espace de rencontre des subjectivités en lutte, résume le sociologue français Fabrice Granjon dans son ouvrage Mobilisations numériques: Politiques du conflit et technologies médiatiques (Presses des Mines 2017).» L’objectif revendiqué, poursuit-il, est de «donner lieu à l’élaboration de mobilisations nouvelles et d’actions directes dans l’espace physique».
Interdit en Allemagne depuis 25 août
Ces dernières années, plusieurs gouvernements européens ont tenté d’enterrer ces antennes-relais logées par IMC. Une pratique venue des Etats-Unis, censée lutter contre les violences policières, irrite particulièrement les autorités au début des années 2010 : le «copwatching», une méthode qui consiste à publier les photos de policiers et gendarmes en service sur la toile, et de les recenser. Le tout assorti de commentaires diffamatoires.
Les sites de Grenoble et de Paris sont alors accusés par les syndicats de policiers d’être des «sites anti-flics». La place Beauvau s’y reprend à deux fois pour suspendre leur activité. Clauge Guéant obtiendra en 2011 et 2012 des fournisseurs d’accès internet la déconnexion du Copwatch parisien pour injures et diffamation. Un coup d’épée dans l’eau toutefois puisque des «sites miroirs» – des copies exactes- prennent rapidement la relève, comme le note Europe 1 -sans parler des pages hébergés sur Tor, un réseau qui promet anonymat et intraçabilité.
Trois ans plus tard, Indymedia Paris refait parler de lui et accueille la revendication de l’attaque de 453 Vélib’ dans l’est de Paris et à Montreuil. «Nous avons voulu faire payer ces esclavagistes», détaille un communiqué publié au lendemain du raid. En cause : la procédure de réparation pénale que le groupe JCDecaux a mise en place depuis un an pour les mineurs pris en flagrant délit de dégradation ou de vol de Vélib’.
Une méthode qui n’est pas «sans risque»
Pêle-mêle, la plate-forme alternative hébergera ensuite la revendication de l’attaque de l’ambassade de France, ou encore en mai 2016 la liste des données personnelles – dont les adresses et numéros de téléphone – de plus de 2000 participants au congrès du parti de droite populiste Alternative pour l’Allemagne (AfD). Le 25 août, les autorités d’outre-Rhin ont eu la peau de leur canal national, Linkusten (sic!, NdA). Une mesure prise après la saisie d’armes blanches (couteaux, matraques, tuyaux, lance-pierres) lors d’une perquisition dans les locaux du forum, très actif lors du G20 à Hambourg marqué par de nombreux affrontements avec les forces de l’ordre.
Ce genre de plate-forme horizontale et collaborative n’est pas «sans risque», abonde Fabrice Granjon. «Force est de constater qu’après s’être rapidement développés, les IMC ont eu du mal à administrer certaines des conséquences liées au refus d’exercer un contrôle éditorial serré, permettant notamment que se propagent des posts sexistes, racistes, antisémites et fascisant, conduisant par exemple, à plusieurs reprises, certains sites (notamment en France) à stopper momentanément leurs activités et à réviser leur charte éditoriale». En France, c’est à Lille, Nantes ou encore Grenoble que l’on retrouve les communautés les plus actives, là où les modérateurs «exercent un contrôle plus strict sur leurs publications».
Preuve de son influence, Indymedia a aussi inspiré des mouvements alternatifs plus structurés à travers le monde, comme Occupy Wall Street, Democracy Now !, ou celui des Anonymous.
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Mais qui se cache derrière les actes de sabotage commis en Auvergne-Rhône-Alpes ?
France3 / jeudi 20 juillet 2017
Depuis plusieurs mois, de nombreux actes de sabotage, contre des équipements publics ou privés, ont été perpetrés dans la région Auvergne-Rhône-Alpes. Toujours revendiqués par une mouvance anarcho-autonome, reste à établir désormais si un ou plusieurs groupes se cachent derrière le mouvement.
Saint-Laurent-sous-Coiron (Ardèche), Piegros-la-Clastre (Drôme), Grenoble (Isère)… Depuis quelques mois, la liste des lieux touchés par des actes de sabotages commis par une mouvance anarcho-autonome s’allonge. Ces dégradations contre des équipements publics ou privés conduisent les autorités à ouvrir plusieurs enquêtes.
Dernier sabotage en date : l’incendie d’une antenne relais de TDF à Saint-Laurent-sous-Coiron, en Ardèche, dans la nuit du 19 au 20 juillet 2017. Plus de 165.000 foyers ont été privés de TNT et des antennes de Radio France et NRJ, sans compter les 40 000 usagers de SFR privés de réseau.
Suite à cet incident, le Parquet de Privas a ouvert une enquête et saisi la section de recherches de Grenoble. Les incendiaires « étaient très bien organisés et savaient très bien ce qu’ils faisaient », assure une source judiciaire, « ils n’ont pas visé ce site au hasard. Mais pour l’instant, on a peu de pistes ».
Ce n’est pas le premier acte du genre dans le secteur. Dans la nuit du 14 au 15 juin, un autre pylône de TDF, à Piegros-la-Clastre, dans la Drôme voisine, avait été visé par un incendie. Et dans la nuit du 8 au 9 juin, c’est un local du distributeur d’électricité Enedis qui partait en fumée, à Crest, encore dans la Drôme. A chaque fois, un communiqué diffusé sur le site internet Indymedia, proche de la gauche radicale, a revendiqué l’action.
Le parquet de Valence a lui aussi ouvert une enquête, confiée également aux gendarmes de Grenoble.
Grenoble comme point de départ ?
Grenoble serait-elle donc le centre névralgique des opérations de ce mouvement anarcho-libertaire ? Tout a commencé en mars dernier, quand un local du parti Les Républicains a été saccagé pour lutter contre « les sentinelles de l’ordre marchand« . Quelques jours plus tard, sept véhicules étaient incendiés, dont trois du centre communal d’action social (CCAS) de Grenoble, accusé de « cogérer la misère« .
Vint ensuite le tour de la Métropole de Grenoble qui était visée avec sept véhicules brûlés. Cette fois-ci, le communiqué revendiquait cette action au nom de la lutte contre les « sites de stockage et d’exploitation de la ressource humaine ». Le 11 avril, 185 composteurs du réseau de tramway ont été dégradés, avant que 11 véhicules d’Enedis ne soient incendiés, le 30 mai, au nom de la lutte contre « un des mille avatars de l’infrastructure capitaliste ».
Une pensée intellectuelle commune ?
La Police judiciaire et la Sûreté départementale ont été chargées d’enquêter. En mai, une source proche du dossier faisait part de son « inquiétude » face à « ce type d’actions ciblées », une nouveauté à Grenoble. Pour l’instant, un rapprochement des dossiers n’est pas à l’ordre du jour. « On a peut-être une pensée intellectuelle commune » chez les auteurs de tous ces délits, concède à l’AFP une source proche de l’enquête. « Ils sont peut-être issus d’une mouvance commune mais chacun enquête de son côté pour le moment », complète le parquet de Valence.