Suisse/Allemagne : Saboter la normalité capitaliste

Barrikade / lundi 14 avril 2025

(Zone frontalière entre la Suisse et l’Allemagne) Saboter la normalité capitaliste – Attaque contre l’infrastructure ferroviaire

Dans la nuit du 9 avril, à différents endroits près de Bâle, nous avons mis le feu à des câbles de signalisation et d’alimentation du chemin de fer, avec plusieurs engins incendiaires.

Jusqu’à présent, les flics et les médias ont gardé le silence sur notre action.

Située sur les frontières entre trois pays, avec des liaisons maritimes allant jusqu’à la mer du Nord, un réseau ferroviaire et routier très développé, ainsi qu’un aéroport, la ville de Bâle est un nœud logistique central des flux de marchandises qui font fonctionner la normalité capitaliste. Comme nous n’avons très que peu d’estime pour cet état de choses, nous avons attaqués son infrastructure, pour l’interrompre, au moins pour un court instant.

Notre attaque vise concrètement le transport ferroviaire transfrontalier de marchandises et de personnes et la liaison ferroviaire vers le port de Kleinhüningen.
L’une des liaisons nord-sud les plus importantes d’Europe passe par Bâle. La ligne entre Rotterdam et Gênes fait partie du programme Trans-European Transport Network (Réseau transeuropéen de transport, RTE-T) et est en expansion constante. Les trois ports rhénans de Bâle réalisent le 10% du commerce extérieur suisse. Environ un tiers de toutes ses importations de produits pétroliers est chargé ici sur des trains et des camions. Un conteneur sur quatre en route vers la Suisse passe par les ports de Bâle. Chargé de marchandises fabriquées à partir de matières premières pillées dans le monde entier ou de matériaux de construction avec lesquels de plus en plus d’autoroutes, de banques et de taules sont construites, des sols sont scellés et tout le vivant est enterré sous une épaisse couche de béton.

Des industries pharmaceutiques et chimiques basées à Bâle importent aussi par cette voie les machines et les matières dont elles ont besoin pour la fabrication de produits qui seront ensuite exportés par la même voie. Qu’il s’agisse des produits chimiques cancérigènes de Syngenta ou des médicaments anticancéreux de Novartis ou Roche, ce sont les deux faces de la même médaille. Au lieu de se consacrer sérieusement à guérir globalement des maladies provoquées en grande partie par le complexe techno-industriel (et encore moins de s’attaquer à leurs causes), on lie les gens à un système de santé qui est orienté avant tout vers les profits des groupes pharmaceutiques et vers le fait de nous maintenir en forme pour être utilisé.es au travail, jour après jour.

Pour le fonctionnement sans accrocs de ce système destructeur de la vie, les voies de transport de marchandises sont d’une grande importance. Avec leur logistique, SBB Cargo et DB Cargo [les deux opérateurs de fret ferroviaire appartenant respectivement aux compagnies ferroviaires suisse (la SBB/CFF/FSS) et allemande (la Deutsche Bahn) ; NdAtt.] profitent du néocolonialisme et de la guerre. Ils font partie de l’infrastructure militaire. La Deutsche Bahn transporte du matériel militaire de l’armée allemande et des armées de l’OTAN. Via les réseaux ferroviaire est transporté dans le monde entier le fret mortel de l’industrie de l’armement, nécessaire aux déplacements forcés, à la spoliation des terres, au génocide et au maintien des rapports sociaux dominants.
L’industrialisation et donc l’approfondissement des rapports de pouvoir et des structures d’exploitation n’auraient sans doute pas été possibles sans l’invention du chemin de fer. Aujourd’hui encore, cette technologie sert à coloniser des territoires non encore développés et à les rendre accessibles à l’exploitation capitaliste (par exemple, la participation de DB au projet Tren Maya au Mexique et à la liaison ferroviaire avec un nouveau port en eau profonde, dans l’est de l’Amazonie brésilienne).

Maintenant, la question pourrait se poser du pourquoi nous attaquons juste le transport ferroviaire, alors que celui-ci est censé être beaucoup plus respectueux du climat que par exemple le transport routier. Tout d’abord : nous trouvons que les autoroutes sont de la merde aussi. Nous considérons toutefois que le « processus de transformation verte » est un récit mensonger, par lequel on essaye de nous vendre l’espoir dans un avenir écologique du système.
La locomotive du progrès, verte, nous sauvera de la catastrophe climatique avec des solutions technologiques, dit-on, et elle est neutre en CO2 !
Cependant, pour nous, c’est précisément ce progrès qui est la catastrophe. En plus du fait que ce n’est pas moins, mais de plus en plus de CO2 qui est rejeté dans l’atmosphère, au nom de l’énergie verte et de la mobilité respectueuse du climat, le lithium, le cobalt et les terres rares sont extraits en de quantités toujours grandissantes, en détruisant ainsi des écosystèmes et des biotopes. L’extractivisme ravage des surfaces de plus en plus grandes de la Terre et il fait partie de la même mégamachine qui n’offre à la plupart des êtres humains qu’une existence dans la misère sociale. Il est temps de tirer le frein d’urgence.

Encore quelques mots sur l’interruption du transport des voyageur.euses : juste à côté de la voie ferrée se trouve la prison de Bässlergut, où des personnes sont emprisonnées en rétention administrative en vue de leur expulsion, parce qu’elles sortent des règles de l’ordre colonial mondial et elles n’intègrent pas la chaîne de production là où elles sont nées. Certain.s d’entre eux/entre se sont trouvées en grève de la faim, à plusieurs reprises ces derniers mois, pour lutter pour la liberté.
Ces structures de contrôle et de soumission agissent ici, à la frontière germano-suisse, même en dehors des murs de la taule, sous la forme d’une véritable chasse à l’homme. Ici, dans la zone de libre circulation des personnes, des flics fédéraux allemands patrouillent en masse, pour éviter que cela ne soit pas mal interprété comme une libre circulation des personnes. Car, bien entendu, celle-ci ne s’applique pas à tout le monde. Les travailleur.euses et les touristes doivent être transporté.es ici. Mais ceux/celles qui n’ont pas les bons papiers, ou n’en ont pas du tout, se voient refuser le droit à un trajet en train de Bâle à l’Allemagne.
Nous considérons notre action aussi comme partie la lutte contre le régime meurtrier de l’immigration et des frontières. Nous sommes solidaires de tou.tes celles/ceux qui franchissent les frontières et défient les politiques meurtrières de l’Europe.

Dans le monde dans lequel nous vivons, on nous dit que tout ce que nous avons cité ci-dessus est indispensable. Que si c’est certes à nous de tirer le meilleur parti de notre propre vie, nous ne pourrions jamais – livré.es à nous mêmes – mener une vie aussi bonne et sûre que celle qui nous est imposée.
Mais il y a aussi d’autres récits. Des histoires d’une vie en dehors des logiques de l’utilisation, des histoires de luttes intergénérationnelles de communautés du monde entier contre l’oppression, l’exploitation et la destruction de la nature. Des histoires de résistance, d’entraide et de sollicitude.
Ces récits ne sont pas seulement des idées, mais aussi des possibilités. Nous croyons en ces histoires et nous voulons continuer à les écrire. Nous voulons attaquer l’existant pour faire place au possible.

Sabotons la normalité capitaliste !
Ni frontières, ni nations !

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