Journées contre le béton / lundi 8 avril 2024
Ce lundi 8 avril, 17 personnes ont été arrêtées en Normandie et Ile de France dans une opération menée par la Sous-Direction-Anti-Terroriste. Une partie d’entre elles a été emmenée dans les locaux de Levallois-Perret et pourrait y rester 96 heures.
Ces arrestations font suite à la campagne d’actions contre Lafarge et le monde du béton initiée par plus de 200 organisations écologistes, syndicales, luttes locales contre l’artificialisation des terres et comités locaux des Soulèvements de la terre (appel et listes des signataires). Cette campagne avait mobilisé des milliers de personnes et abouti du 9 au 12 décembre 2023 à une cinquantaine d’actions simultanées. Des occupations, blocages, happenings, rassemblements, désarmements sur des dizaines de sites Lafarge et autres centrales à béton sont survenus majoritairement en France mais aussi en Suisse, en Belgique ou en Allemagne. Un soutien fort avait été marqué à cette occasion aux personnes mises en cause, elles aussi par l’anti-terrorisme, dans le désarmement de l’usine Lafarge Bouc-Bel-Air près de Marseille.
La vague d’arrestations d’aujourd’hui vise l’intervention, durant une dizaine de minutes, d’une centaine de personnes sur un site Lafarge à Val-de-Reuil avec de la peinture et de la mousse expansive. La police anti-terroriste était intervenue sur les lieux sous prétexte d’une soi-disant « séquestration » expresse d’un agent de sécurité. Ce story telling répressif s’était rapidement dégonflé par la suite. (communiqué publié sur l’action ici)
Nous voyons néanmoins ici l’entêtement du gouvernement à écraser par la force l’essor des mouvements écologistes, ainsi que les résistances qu’il ne parvient pas à canaliser face à l’exploitation économique. L’usage récurrent des moyens de l’anti-terrorisme pour diaboliser spécifiquement les mobilisations qui menacent les intérêts des lobbys industriels est frappant. Elle marque à quel point ce gouvernement leur est inféodé. L’expansion des moyens de surveillance débridée sur un large ensemble de militant.es est particulièrement inquiétante. La SDAT se met aujourd’hui de nouveau au service d’une des entreprises les plus toxiques du monde. Rappelons qu’en plus d’impacter la santé de ses employé.es, de bétonner les terres, d’être une source majeure de production de CO2 et de pollution de l’air, la multinationale Lafarge-Holcim est toujours poursuivie pour complicité de crime l’humanité et financement du terrorisme au vu et au su de l’État français.
Nous appelons à soutenir les personnes arrêtées et mises en cause aujourd’hui pour leur participation à la campagne nationale d’action contre Lafarge et le monde du béton.
Nous appelons à continuer à nous mobiliser pour défendre les terres et l’eau.
Déjà trois rassemblements de soutien sont organisés : à Rouen mardi à 18h devant le palais de justice ainsi qu’à Levallois-Perret devant les locaux de la SDAT et à Caen devant la préfecture. Mais, iels méritent d’être soutenu·es extrêmement largement. Organisons des rassemblements et des manifestations de soutien partout en France et dans le monde. Nous étions des milliers à participer à la campagne d’action de décembre, soyons encore plus nombreu·ses cette semaine. […]
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Paris-Normandie / lundi 8 avril 2024
C’est Rémi Coutin, le procureur de la République d’Évreux, qui a diffusé l’information. Dix-sept personnes ont été interpellées lundi 8 avril 2024 en début de matinée en Seine-Maritime, dans l’Eure, l’Orne, le Calvados et en Seine-Saint-Denis. Elles sont toutes majeures et l’interpellation « s’est déroulée sans incident, et l’ensemble des personnes concernées se trouvent actuellement en garde à vue dans différents locaux de police », précise le communiqué.
Il est environ 12 h 30, dimanche 10 décembre 2023, quand des individus masqués (entre 80 et 100) pénètrent dans le site Lafarge, une centrale à béton située à Val-de-Reuil, vêtus de combinaisons blanches, les visages dissimulés et porteurs de gants. L’attaque a duré une dizaine de minutes.
450 000€ de préjudice
Mousse expansive à l’intérieur de plusieurs appareils, béton coulé dans une arrivée d’eau, compteurs détériorés, plusieurs centaines de milliers de billes de polystyrène libérées, vitres et matériel informatique brisés, tags « Lafarge terroriste » ou « le béton tue » entre autres : le préjudice occasionné est estimé à plus de 450 000 €.
« Le gardien a été séquestré dans son local de gardiennage avec la porte bloquée, sans violence, expliquait le procureur le 10 décembre 2023. Les individus, dont beaucoup en blanc, ont dégradé le site avec des tags relatifs à l’affaire Lafarge et sa mise en examen en tant que personne morale en Syrie (mise en examen pour complicité de crime contre l’humanité, NDLR), des références à la Palestine, des insultes envers le ministre de l’Intérieur et des tags plus écolos. »
La sous-direction antiterroriste (SDAT) de la Direction nationale de la police judiciaire et la direction territoriale de la police judiciaire de Rouen avaient été cosaisies par le parquet d’Évreux.
Les dix-sept personnes en garde à vue doivent répondre des chefs « de séquestration avec libération volontaire avant le septième jour en bande organisée, destructions/dégradations graves en réunion, association de malfaiteurs en vue de la préparation d’un délit puni de dix ans d’emprisonnement et violences sur personnes dépositaires de l’autorité publique ».