Le Figaro / lundi 20 septembre 2021
Deux moines d’un couvent catholique intégriste du Rhône ont été mis en examen, la semaine dernière, pour s’en être pris à des antennes-relais par hostilité au déploiement de la 5G, a-t-on appris lundi de source judiciaire.
Selon le parquet de Villefranche-sur-Saône, confirmant des informations du quotidien régional Le Progrès, les deux hommes, âgés de 39 et 40 ans, ont reconnu avoir mis le feu à un premier pylône téléphonique, dans la nuit du 14 au 15 septembre à Saint-Forgeux, au nord-ouest de Lyon. Les dégâts avaient été limités.
La nuit suivante, les deux moines, membres d’un couvent situé dans le Beaujolais, ont été interpellés en flagrant délit, par les gendarmes, tandis qu’ils tentaient d’incendier une antenne dans une autre commune, à Ancy.
Placés en garde à vue puis présentés à un juge d’instruction, ils ont reconnu les faits, expliquant avoir agi «pour prémunir la population des effets nuisibles» de la 5G, a précisé à l’AFP la procureure de Villefranche, Laëtitia Francart.
Mis en examen pour «destruction et tentative de destruction par moyen incendiaire» et «association de malfaiteurs», les deux moines ont été placés sous contrôle judiciaire. Ils font partie d’une communauté capucine basée au couvent Saint-François, à Villié-Morgon, rattaché au mouvement intégriste de la Fraternité Sacerdotale Saint-Pie X, selon son site internet.
Selon Le Progrès, une porte-parole du couvent a évoqué «un acte isolé et une erreur de jeunesse». «Les ondes sont très nocives à la santé et ils souhaitaient agir pour le bien-être de l’humanité», a-t-elle déclaré au journal.
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Note d’Attaque. Encore une fois, loin de l’ineptie idéologique selon laquelle « les actions parlent d’elles-mêmes » (c’est-à-dire que des spécialistes de la parole se chargeront, après-coup, de leur donner un sens, leur sens bien à eux), parce que « l’aspect important [serait] la destruction elle-même » [citation de l’un des pamphlets de la vulgate « anonymiste »], la question des motivations des actions ne peut pas être ignorée.
On ne peut que partager la remarque pertinente contenue dans la revendication d’une action récente, qui exprime « à voix haute le problème épineux des cibles d’attaques, qui ces dernières années sont devenues un point commun avec les fascos/conspis. Des antennes (rappelons que sur quasiment tous les procès pour des cramages d’antennes en France Boris a été la seule personne à ne pas exprimer d’idées conspis), aux centres de vaccination. Qu’est-ce que ça dit de l’anarchisme actuel ? Et comment faire en sorte qu’on ne puisse pas confondre les actes anarchistes des actes conspis, et pourquoi c’est important ? «
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Mise à jour du 23 septembre : Et à Paris… Deus vult !
actuParis / jeudi 23 septembre 2021
Lors de son audition par les enquêteurs de la Brigade criminelle, le suspect du sabotage de 26 antennes-relais 5G avait fait le lien entre la 5G et le vaccin contre le Covid-19. Un lien que le mis en cause a réaffirmé, mercredi 22 septembre 2021, lors de son procès au tribunal de Paris. L’homme, estimé « irresponsable pénalement », va être interné.
Si Kalo* est monté sur le toit de 26 immeubles, parfois par effraction, pour sectionner les câbles des antennes-relais qui s’y trouvaient, « c’est avec une dimension humaniste », a tenté l’avocate de l’homme âgé de 32 ans, né à Aubervilliers (Seine-Saint-Denis). Il aurait agi pour « sauver la France et la population française », en pensant « au bien commun ».
Car l’objectif affiché du trentenaire est aussi altruiste que… complotiste : « Dieu m’a envoyé des rêves pour que j’alerte les gens sur le danger du vaccin. C’est la marque de la Bête, du démon. Les gens me prennent pour un fou, mais ils ne lisent pas la Bible. Le liquide injecté dans leur épaule va aller dans la main droite, et leur esprit va partir. »
Cette opération serait, d’après ses dires, réalisée avec l’aide de la 5G « dans la nuit du 31 octobre à Halloween », a expliqué le président de l’audience en reprenant les dires de Kalo en garde à vue. Masque sous le nez, le prévenu répète plusieurs fois « avoir fait le test de l’aimant », autre théorie complotiste répandue par les anti-vaccins. Des théories qui ont abreuvé Kalo, qui consulte de nombreux « sites, forums et réseaux sociaux » sur le sujet.
En plus d’en consulter, Kalo en est un animateur, avec une chaîne YouTube sur laquelle il a appelé à « débrancher la 5G » fin août, Bible à la main, en renvoyant vers son site où toutes les antennes de France sont cartographiées. Une création de site compatible avec sa vie professionnelle : informaticien en CDI dans une banque, payé plus de 2 000 euros par mois, diplômé de maths sup et de l’École centrale, propriétaire, jamais interpellé ni condamné avant son arrestation lundi pour les faits commis du 14 août au 19 septembre.
« Je ne suis pas une mauvaise personne », a répété Kalo. Il ne fait pas l’objet de mesures particulières, et semble avoir dérivé avec la pandémie de Covid-19. « Mon frère, si tu vois pas le complot depuis 2020, c’est que t’es aveugle ! Je ne suis pas un terroriste musulman qui pose des bombes comme Daech, je suis là pour désamorcer la bombe. Si la bombe explose en octobre, vous penserez à moi », a-t-il asséné à un avocat de partie civile.
Kalo insiste : il n’est ni fou, ni violent. Lorsqu’un voisin est venu à sa rencontre, attiré par du bruit sur le toit de son immeuble, l’homme s’est présenté comme un technicien Orange, sans faire preuve de violence. Forcément : « Dieu me l’interdit », a-t-il justifié. Kalo s’inquiète quand le président souligne que ces coupures d’antennes auraient pu causer une rupture d’accès aux services de secours, et se rassure quand le président précise que d’autres antennes ont pu prendre le relais. « Aucun événement grave n’a été signalé. »
Sur les 26 sabotages qui lui ont été reprochés, pour moitié à Paris et les autres en région parisienne, Kalo en a reconnu neuf. Ceux pour lesquels la vidéo-surveillance a capté le passage de la voiture de son père, qu’il conduit. Les 17 autres, Kalo ne « s’en souvient pas du tout ». Et même si son téléphone a borné à côté de chacune des antennes mises hors service au moment où elles ont été déconnectées, il a continué de nier.
Lors de la perquisition de son domicile, les enquêteurs ont découvert une meuleuse, une pince coupante et d’autres outils que Kalo a reconnu avoir utilisé pour couper les câbles. « Il y a eu tellement de câbles sectionnés que Bouygues n’avait pas assez de stock pour tous les remplacer », a expliqué l’avocat de l’opérateur, partie civile avec Orange, SFR et Free.
Bouygues, dont 22 antennes ont été endommagées, a réclamé 20 000 euros de dommages et intérêts. SFR a réclamé près de 300 000 euros. Ces montants seront débattus lors d’une audience sur les intérêts civils prévue pour mars 2022. D’ici là, Kalo a pris la route d’un hôpital psychiatrique. L’expert psychiatre qui l’a examiné a conclu à une « psychose nerveuse de type paranoïaque », qui a conduit à l’abolition de son discernement au moment des faits. Pénalement irresponsable, Kalo va être interné pour une durée décidée par l’hôpital et par le JLD, juge des libertés et de la détention. Si le plan machiavélique de « la Bête » n’a pas lieu le 31 octobre, ce qui est plutôt probable, il pourrait « ne plus y avoir de trouble mental ».
* Le prénom du mis en cause a été modifié.
Note d’Attaque : C’était quoi déjà cette vieille ritournelle inepte ?
Ah, oui… « que chacun chacune agisse […] pour ses propres raisons, évidemment ».
Justement, lui c’était la volonté divine !