Chili : 18 novembre – 31ème jour de révolte sociale

Anarchists Worldwide / mercredi 20 novembre 2019

(Tiré des dernières mises à jour publiées sur les réseaux sociaux au Chili)

UN MOIS INOUBLIABLE !
Sous la capuche… un sourire impossible à éteindre !
Nous respirons un mélange de fumée et de gaz lacrymogène. En regardant autour, le spectacle nous submerge : des milliers de personnes se battent encore. Une immense émotion nous traverse et sous la capuche se dessine un sourire impossible à éteindre. Nous vivons ce que nous avons lu des centaines de fois !
Il n’y a aucune certitude de rien, notre impulsion continue à être la recherche de la liberté. Mais presque toujours notre désir s’oppose à celui de la foule, nous sommes encore une minorité noire… mais une minorité très active.

Le week-end a vu cinq attaques incendiaires contre des banques à Peñalolén, Cerro Navia, Lo Espejo, El Bosque et Santiago, ainsi qu’une attaque à coup de cocktails Molotov contre un poste de police à Maipu, qui s’est terminé par l’arrestation de deux personnes.

Aujourd’hui, lundi, sur la place principale de Puente Alto [grande ville de la banlieue sud de Santiago ; NdAtt.], il y a eu des affrontements avec les keufs et une attaque contre leur poste de police. Sur la place centrale de de Maipu [autre grande ville de la banlieue sud-ouest de Santiago ; NdAtt.], il y a eu des émeutes et un canon a été fait tomber du monument au milieu de la place ; les étudiants ont occupé le CODEDUC (1).

A Antofagasta [dans le nord du Chili ; NdAtt.], des inconnu.e.s ont peint en noir l’ancre, icône de la ville. A Iquique [tout au nord du Chili ; NdAtt.], la guérite d’une caserne a été attaquée avec des cocktails Molotov. A Valdivia [dans le sud du pays ; NdAtt.], le siège du Parti socialiste a été incendié. A Concepción [dans le centre du Chili, un peu au sud de Santiago ; NdAtt.], les drapeaux de tous les partis ont été brûlés, signe que cette Révolte n’a ni dirigeants ni partis politiques. A Santiago, l’ancienne candidate présidentielle [aux élections de 2017, pour une coalition d’extrême gauche et de listes citoyennes ; NdAtt.] Beatriz Sánchez a été expulsée de « Ground Zero » [Plaza Italia, centre symbolique de la révolte et point de départ de la plupart des manifestations à Santiago ; NdAtt.], car accusée de participer aux négociations avec l’élite.

Parmi les milliers de personnes sur la « Plaza de la Dignidad » [« place de la dignité », comme est appelée par les manifestant.e.s la Plaza Italia; NdAtt.], flottaient des drapeaux anarchistes noirs et des drapeaux anarco-écologistes. Des personnes cagoulées distribuaient des journaux anarchistes et une fanfare jouait « Bella Ciao ».

Quand le soleil s’est couché, la police a lâché toute son artillerie, tirant à la chevrotine et avec des grenades lacrymogène, en grande quantité. Aujourd’hui, face à cette violence policière, certain.e.s ont préféré prendre le risque de se jeter dans la rivière Mapocho pour échapper.

Le poste médical d’urgence central a traité plus de quarante blessures par chevrotine, le total est démultipliée si on y ajoute les autres centres médicaux et le personnes qui ne se sont pas rendues dans un centre de soin. Un.e. manifestant.e. a eu une fracture du crâne lorsqu’il/elle a été touché.e par une grenade lacrymogène, elle/il devra subir une opération d’urgence.

A Valparaiso [deuxième ville du Chili, elle est sur la côte, à un centaine de km de Santiago ; NdAtt.], la police a laissé dans un état critique un jeune homme, qui a reçu une balle dans le cou. Des manifestant.e.s ont dénoncé les brûlures au 2e degré causées par l’eau toxique du blindé-canon à eau.

La vengeance vient la nuit, lorsque des inconnu.e.s profitent des données publiées par Anonymous et poursuivent leurs attaques nocturnes contre les voitures privées et les maisons des policiers.

Des députés appellent à la démission du Général commandant des Carabineros ; le gouvernement le confirme à son poste, malgré les accusations de violations des droits de l’homme.

Il y a des vidéos devenues virales de stands de nourriture, de locaux commerciaux et de services où les flics en civil sont littéralement jetés dehors, on ne veut pas qu’ils fassent des achats ni les servir, à cause de leur travail de répression.

Les centres de recrutement se vident, en raison du grand nombre de jeunes qui refusent de faire leur service militaire. L’expression du refus du travail meurtrier du bras armé de l’État et du capital.

Des grands incendies de forêt se développent dans différentes parties de Valparaiso et tout indique qu’ils sont allumés délibérément. Les habitant.e.s accusent l’État d’essayer de les démobiliser par cette urgence.

Il n’y a toujours pas de réponses aux demandes de la population. Les bureaucrates professionnels retardent l’augmentation des pensions et du salaire minimum, l’annulation de la dette de CAE (2), etc. Ils disent qu’il n’y a pas de ressources financières et à long terme ils n’offrent que des miettes. Nous ne les avons jamais crus, encore moins maintenant.

Les syndicats ont annoncé une grève de 48 heures pour les 19 et 20 novembre. Grève générale pour le 21 novembre et les enseignant.e.s réitèrent l’appel au boycott du test Simce (3).

Les cérémonies des diplômes de fin d’années sont remplies de banderoles en soutien à la révolte et les sportif.ve.s font des gestes de solidarité avec les mutilés, se couvrant l’œil de la main pour protester, pendant qu’ils/elles reçoivent des médailles sur les podiums ou posent pour les classiques photos d’équipe.

POUR LA MULTIPLICATION DES EXEMPLES D’ORGANISATION ANTI-AUTORITAIRE !
NOUS ESSAYONS TOUJOURS DE DONNER VIE À L’ANARCHIE !

 

Notes d’Anarchists Worldwide :
(1) Une école à Maipu.
(2) Système de crédit pour les frais de scolarité (CAE), qui fait que les diplômé.e.s universitaires ont 20 ans pour rembourser les énormes dettes contractées pour le coût de leurs études.
(3) Système de mesure de la qualité de l’éducation, une batterie de tests utilisés au Chili pour mesurer certains aspects des programmes scolaires. Actuellement, une agence d’État, l’Agence pour la qualité de l’éducation, est chargée d’administrer les tests aux élèves des 2e, 4e, 6e et 8e années (éducation primaire) et des 10e et 11e années (2e et 3e années de l’enseignement secondaire).

La Moneda, palais présidentiel, le 19 octobre

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