Anarchist Black Cross Belarus / mercredi 20 février 2019
Au début de l’année [2018; NdAtt.], tout le monde était sous le choc à cause de l’”affaire Réseau” en Russie, lors de laquelle des anarchistes ont été torturé.e.s et emprisonné.e.s. Selon le FSB [les services secrets russes; NdAtt.] une section du “Réseau” opérait aussi en Biélorussie. Le KGB [les services secrets biélorusses, qui, à différence de leurs voisins, ont gardé le nom de l’époque soviétique; NdAtt.] n’a pas réagit publiquement à cette déclaration, cependant on a remarqué un effort grandissant dans la surveillance de jeunes en lien avec le mouvement anarchiste, à différents endroits de la Biélorussie.
Hiver
Au début du mois de février 2018, le KGB a commencé à s’intéresser à l’organisation régionale d’éducation Critical Thinking. Un de ses volontaires a été convoqué pour une discussion informelle par téléphone – il avait été détenu par le passé avec l’anarchiste russe Piotr Ryabov et condamné à une amende pour « exposition publique de symboles Nazi » [note 1], le disque dur de son ordinateur avait été confisqué. Au même temps, sa mère a été appelée elle aussi pour une discussion informelle. Plusieurs ami.e.s de ce volontaire ont été embarqué.e.s par la police, qui les a interrogé.e.s et relâché.e.s. La police était intéressée à l’activité de Critical Thinking et elle a aussi essayé de forcer des gens à signer des contrats de collaboration [2].
Le 8 février, la police anti-extremisme de Mogilev a rendu visite aux parents d’une activiste. Ils ont été questionné.e.s sur les activité de leur fille, ses intérêts politiques et ainsi de suite. Leur appartement a été perquisitionné, grâce à un mandat émis suite à une affaire de 2017, quand de la peinture rouge avait été projeté sur une statue de Lenine dans cette ville. Il y a eu une descente des flics aussi dans l’appartement des parents d’un.e autre activiste. Cet.te activiste était appelé.e à témoigner dans la même affaire [3].
Les anarchistes Kirill A. et Igor M. ont été condamnés à 3 ans de contrôle judiciaire pur avoir brûlé un panneau d’affichage avec des annonces de la police. Une troisième personne impliquée dans ce cas est toujours en cavale.
En février, la police a aussi fait visite aux activistes qui avaient été.e.s emprisonné.e.s à pendant les protestations contre la loi sur les « parasites sociaux » de 2017. Les flics sont allés aux adresses que ces personnes avaient déclaré et ont posé des questions à propos des actuelles activités des gens. Certaines personnes ont été informée du fait que leur interrogatoire faisait suite à une enquête commencée le 15 mars 2017 [4].
Le 23 février, deux policiers de la ville de Brest ont kidnappé un punk dans la ville de Stolin, l’ont amené dans la forêt et ont commencé à lui mettre la pression pour qu’il donne des informations à propos des anarchistes du coin. A un certain moment, ils lui ont demandé quel était son dernier désir et ont pointé un flingue sur son dos. Quelques instants après, ils étaient en train de lui offrir de l’argent pour avoir ces mêmes informations.
Le 26 février il y a eu une descente dans l’appartement d’un activiste social, à Minsk. Selon la police, ils étaient là à la recherche d’armes, explosives et d’autre matériel interdit. Ils n’ont rien trouvé de tel dans l’appartement, mais les flics ont saisi un ordinateur portable, un téléphone, des disques durs externes, des journaux et des tracts. En plus de ça, les flics ont saisi aussi le couteau de son père. Cet activiste souligne, que plusieurs semaines avant la descente, la police l’avait appelé pour l’inviter à venir pour une discussion, ce qu’il avait refusé. Il fait le lien entre la perquisition et la tentative de la part de la police de le punir pour cela. Les intérêts de la police peuvent être liés à son investissement dans le développement de l’Ukraine.
Printemps
Le 12 mars, Svyatoslav Baranovich [5] a été condamné à 3 ans pour s’en être pris à des policiers lors des protestations du 15 mars [2017 ; NdAtt.] contre la loi sur les « parasites sociaux ». Baranovich était en train d’aider des anarchistes à s’enfuir et, dans une échauffourée, a donné des coups de poings à un flic en civil.
Le 26 mars, l’activiste Ilya S. a reçu une amende de 200 euros pour avoir ignoré les appels du KGB pour une conversation informelle.
A partir de mars, des infos ont commencé à circuler à propos de l’interdiction pour certains anarchistes d’entrer en Russie. Ces interdictions sont notifiées aux personnes qui arrivent dans ce pays : après le contrôle du passeport, elles sont informées de cette interdiction. La logique qui est derrière ces mesures n’est pas claire. Un lien peut être fait, entre autre, avec leur collaboration avec les services secrets biélorusses ou avec l’affaire « Réseau ».
Ce printemps, un antifasciste, Y., qui avait prévu d’aller à Moscou pour travail a été emprisonné. Il était accusé d’avoir publié un vidéo de propagande nazi et accusé d’incitation à la haine raciale. La vidéo était partagée sur sa page personnelle et était accompagné par un commentaire ridiculisant les Nazis. Sa maison a été perquisitionnée et il a passé plusieurs jours en détention. En ce moment, il est dans l’attente de son procès.
Le 19 avril, l’anarchiste Fyodor B. a été arrêté par la police anti-extremisme avec l’accusation de diffuser de la pornographie. Cependant, les flics n’étaient pas intéressés aux vidéos sur ses comptes sur les réseaux sociaux, mais plutôt à son activité dans le mouvement anarchiste, ses contacts et sa vie privée. Actuellement, il est soumis à une interdiction de quitter le pays.
Le 3 mai, à Stolin, trois anarchistes et anti-autoritaires ont été interpellé.e.s et interrogé.e.s par la police. Les flics s’intéressaient aux anarchistes et aux punks – qui organise les concerts, comment les gens de Minsk viennent aux initiatives, etc.
Le 6 mai, Aleksandr K. a eu la visite de la police, qui l’a interrogé à propos de l’action qui a eu lieu la veille à Brest : l’autoroute M1 a été brièvement bloquée lors des protestation contre la construction d’une usine de batteries. Il a refusé de donner tout témoignage officiel et a donné des informations seulement pour ce qui concerne son alibi pour cette journée.
Au petit matin du 16 mai, la police a débarqué dans l’appartement de Ilya M. et fait une perquisition [6]. Ils ont dit que la descente avait lieu à cause du même blocage d’autoroute. Des ordinateurs, des portables, des cartes mémoire et un appareil photo ont été saisis.
On sait aussi que la police a perquisitionné un appartement dans la ville de Baranovichi, en lien avec la même action. En dehors cela, l’anarchiste Roman a été perquisitionné lui aussi, à Minsk.
L’anarchiste Vanya K. a été perquisitionné le 18 mai – les flics cherchaient du « matériel extrémiste ». Des habits avec écrit « Animal liberation », « Anti-Globalism Marvin School » e « Destroy Capitalim » ont été saisis. En plus, ils ont saisi des disques durs, des cartes mémoire, des téléphones et des lettres.
A la fin du mois de mai, à Brest, la police a perquisitionné l’appartement d’un activiste à cause de quelques tags effectués dans une autre ville. Ils ont vérifié son ordinateur et ses habits. Ils ont saisi un livre.
Été
Au début du mois de juin, un supporteur antifa de l’équipe FC Viktoria a été arrêté. Il est suspecté d’avoir partagé de la pornographie sur internet. Des enquêtes semblables, à l’encontre de supporteurs de foot, ont été ouvertes à Gorodeya, Ivatsevichi, Gorki. Il y a plusieurs affaires similaires à Minsk. Cela paraît une attaque coordonnée contre des supporteurs de foot militants.
Le 30 juin, les forces spéciales et la police anti-extremisme ont attaqué un camp anarchiste dans la forêt à côté de la ville de Krupki. Après que les flics ont tiré en l’air, tou.te.s les participants au camp ont été obligé.e.s de s’étendre au sol. Un.e à la fois, ils/elles ont été obligé.e.s de se mettre à genoux et déclarer leurs identités devant une caméra. Au total, cette opération a duré plus de huit heures, temps que les activistes ont passé pour la plupart couchés sur le sol humide, sous une forte pluie. La police a saisi des publications et a appelé les services forestiers. Deux activistes ont été accusé.e.s de prélèvement illégal de plantes et de distribution de matériel extrémiste.
En juillet, lors de la conférence « Lectures de Priamoukhino», en Russie, la police a arrêté l’anarchiste biélorusse Artem H. Il a été accusé de consommation de drogues (Artem a refusé de subir un test antidrogue). Il a aussi été invité à laisser le territoire de la Fédération Russe dans un délai de 5 jours, avec l’excuse qu’il « mettait en danger la sécurité nationale ».
En juillet, l’anarchiste Nikolai D. a été arrête près de chez lui. Le même jour le tribunal lui a filé une amende de 100 euros pour diffusion de symboles nazi. Cette affaire était due à une image anti-nazi qu’il avait posté sur Facebook plusieurs années auparavant.
Le même jour, un tribunal a condamné Maria R. à une amende de 110 euros à cause d’une photo avec un chapeau sur lequel est écrit « Class War », ce qui a été défini comme extrémiste.
A la fin du mois de juillet, la police a commencé à effectuer des perquisitions chez les personnes qui avaient été interpellées dans la foret. Dans certains cas, des membres de leurs familles ont été interrogé.e.s aussi.
En août, la police est allée chez Vanya K. pour l’interroger à propos de la descente qui a eu lieu en mai. Les flics lui ont dit que les accusations ont changé : de distribution de matériel extrémiste à crime haineux. Vanya a refusé de parler avec les flics. La police a dit à ses parents qu’il pourrait être impliqué avec le groupe anarchiste Wave Belarus et que cela a été la raison principale de la répression à son encontre.
Le 29 août, une présentation de l’initiative droit-de-l’hommiste « Pravovoye Deystviye », qui soutient les antifascistes et les anti-autoritaires a été sabotée : les propriétaires du lieu l’ont refusé à la dernière minute.
Le 30 août, le tribunal a décidé que les slogans ACAB et СЛОН ( » Mort aux flics à coup de couteaux « ) sur les habits du supporteurs de foot Aleksei S. sont extrémistes. Ensuite, la police a perquisitionné son appartement disant qu’ils cherchaient des preuves de crimes haineux.
Automne
Au début de septembre, un groupe de personnes a vu un feu dans la forêt, à Grodno. Ils/elles ont appelé les pompiers, mais le lendemain ils/elles ont été gardé à vue pendant 8 heures, puisque les flics voulaient les accuser de l’incendie, étant donné que l’une des personnes du groupe est une anarchiste-ecologiste. Le soir, tout le monde a été relâché.
Le 12 octobre, les flics ont fait une descente chez Aleksandr K., à Brest. Il était accusé d’avoir collé une affiche en ville. Pendant la perquisition, les flics n’étaient pas intéressés par les affiches, mais ils ont saisi un ordinateur portable, des téléphones et autres appareils.
Au même moment, la police perquisitionnait la maison de Dmitry L., saisissant le disque dur de son ordinateur.
Le 14 octobre, les deux ont été interrogés au poste de police. Après, on leur a dit qu’ils auraient été gardé jusqu’à la fin de l’action de « nourrir les pigeons » (une proteste qui a lieu chaque semaine à Brest, contre la construction de l’usine de batteries).
Le 2 novembre, a Grodno, le musicien Ales D. a reçu une amende de 250 euros pour avoir partagé sur les réseaux sociaux des informations à propos d’un groupe anarchiste déclaré extrémiste.
Deux semaines plus tard, l’antifasciste Vladislav S. a reçu une amende de 150 euros pour quelque chose du même type. En ce moment là, Vladislav était en train de purger une peine dans un centre de semi-liberté (il peut quitter la prison pour aller travailler). L’affaire administrative aurait pu être une tentative de la part de la police de lancer une nouvelle procédure pénal contre lui, pour non respect des conditions de la liberté conditionnelle.
Dans la même ville, le 20 novembre, Aleksandr G. a reçu une amende de 300 euros pour propagande de symboles nazi et distribution de matériel extrémiste [1].
Hiver à nouveau
Le 2 décembre, six activistes ont été arrêtés pour avoir mis une couronne d’enterrement sur la statue d’un flic du XIXème siècle.
Au début de décembre, à Brest, l’antifasciste Dmitry K. a été condamné à 2 ans de liberté surveillée (semblable aux arrestations domiciliaires). Il était accusé d’une baston dans un bar, quand un type bourré l’a attaqué. Dmitry s’est défendu et six autres personnes sont venues aider le type bourré. Au final, Dmitry et six autres personnes ont eu des blessures légères. Les deux côtés ne voulaient pas porter plainte, mais la police a inculpé le seul Dmitry de ce qui s’est passé.
Le 11 décembre, un artiste-activiste du laboratoire théâtrale Fortinbras a été condamné à une amende de 110 euros pour une action « Déconstruction Militia » qui avait eu lieu plusieurs jours auparavant. Cette action avait été menée en soutien à la communauté LGBT.
Trois jours plus tard Dmitry Poliyenko a reçu une amende de 400 euros pour avoir évité un entretien dans un poste de police. Un autre procès était prévu pour le 19 décembre, mais le camarade ne s’y est pas rendu, du coup on ne connaît pas la sentence.
Le 27 décembre Nikolai D. a reçu une amende de 400 euros pour propagande de l’idéologie nazi [1].
On est également à connaissance de plusieurs affaires dû à des partages sur les réseaux sociaux, en plus de ceux qu’on a listé parce qu’ils ont mené à des perquisitions et des interrogatoires informels. Les informations sur ces cas ne sont pas publiques.
Les bonnes nouvelles
Le 25 avril l’antifasciste Thomas K., qui était en train de purger une peine pour une bagarre, a eu une amélioration des conditions de sa détention et purgera le reste de la peine aux arrestations domiciliaires.
Le 24 octobre, Dmitry Poliyenko a été libéré après avoir purgé deux ans de taule pour s’en être pris à un flic qui contrôlait la circulation lors d’une Critical Mass. Pendant le temps passé derrière les barreaux, il a eu des nombreux problèmes à cause de l’administration pénitentiaire.
La liste du matériel extrémiste anarchiste a augmenté de deux nouvelles brochures, trois affiches, un autocollant. Cinq sites internet ont été interdit, y compris le site de l’Anarchist Black Cross Belarus. Les slogans « Class War », « Terror Machine », « ACAB » et « СЛОН » sont fini aussi sur la liste du matériel extrémiste. A partir de maintenant, la distribution et la possession de ce matériel peut être puni en tant qu’infraction.
Au même temps, les flics de la police anti-extrémisme sont en train de créer des fausses pages dans les médias sociaux, où ils publient des informations sur les anarchistes, y compris des photos et des infos obtenues pendant des perquisitions illégales. Une de ces pages est crée au nom d’un anarchiste qui était suspecté pour l’attaque du bâtiment du KGB en 2017. Sur cette page, la police publie les profiles de différents anarchistes et antifascistes, avec des descriptions de leurs vies, de leurs intérêts et des infos qui peuvent être considérées comme des provocations dans le mouvement anarchiste. Et, bien sur, les liens de ces pages vers du matériel extrémiste ne mènent pas à des enquêtes.
ABC Belarus
Notes :
1. A présent, la police utilise cette loi pour poursuivre les antifascistes et les anarchistes, à cause d’images o symboles antifascistes qui incluent la croix gammée (comme des croix gammées barrées ou brisées).
2. Ces documents de collaboration font de quelqu’un un informateur officiel de la police ou du KGB. En 2015 un scandale a éclaté puisque il s’est avéré qu’un grand nombre de jeunes d’extrême droite avait signé ces contrats, y compris de dirigeants de haut niveau.
3. La police effectue souvent des descentes chez des activistes qui sont considéré.e.s comme témoins, de façon à pouvoir les accuser de quelque chose après.
4. Ce jour là, plus de 30 anarchistes ont été arrêtés après de protestations contre la « loi contre les parasites » [une taxe visant spécialement les plus pauvres ; elle a déclenché des manifestations dans les premiers mois de 2017 ; NdAtt.]. Lors des arrestations, la police a utilisé des gaz dans des transports publics pour en faire sortir les manifestants. Plus tard, le ministère de l’Intérieur a annoncé une procédure pénale pour une agression au gaz contre la police.
5. https://abc-belarus.org/?p=11506&lang=en
6. Selon la loi biélorusse, la police a le droit de perquisitionner les habitations même s’il n’y a pas une enquête en cours, si elle a assez de raisons de croire qu’il y a quelque chose de suspect. Cela est devenu sa tactique préférée pour effectuer des descentes, puisque ça ne nécessite pas de fabriquer des enquêtes.