Indymedia Nantes / vendredi 9 juin 2017
Retour sur le procès du 7 juin contre l’auteur du blog « Le Libertaire Bisontin », poursuivi pour « diffamation et injure publique » à l’encontre du secrétaire général de la Préfecture de Doubs, Jean-Philippe Setbon. Quelques heures avant, des passant-e-s ont pu remarquer quelques pochoirs faisant écho à cette affaire.
Rappel des faits.
Fin août/début septembre, de nombreuses manifs ont lieu à Besançon contre les avis d’expulsion distribués à la pelle à l’encontre de migrants, seuls et en famille, alors que la rentrée des classes approche. Début octobre, le domicile de deux anarchistes, impliqué-e-s dans la solidarité locale avec les migrants, est perquisitionné au petit matin. Les flics justifient leur intrusion à la suite d’un article paru dans le n°8 du journal anarchiste « Séditions » contre le secrétaire général de la Préf’, Jean-Philippe Setbon, qui gère les OQTF au niveau local. Ils ressortiront libres après quelques heures de GAV. Dans les deux semaines qui suivent, trois autres lieux (qui sont les points de distribution du journal « Séditions ») reçoivent la visite des flics afin de remettre en mains propres des convocations au commissariat : il s’agit de la gérante du bar « Ze Music All » (fermé depuis), d’un « Atelier » Rue de Dole, ainsi que du directeur de l’association « la SPAM ». Malgré les coups de pression des flics, leurs recherches restent vaines. Au même moment, le verso du n°8 du journal, sur lequel figure l’article incriminé, est collé un peu partout sur les vitres de commerces et murs de la ville et sa distribution continue de plus belle. Montrer que les tentatives d’intimidation de l’État ne marchent pas est nécessaire pour garder une dynamique de lutte.
Mi-avril 2017, les flics envoient de nouveau une convocation au blogueur « Le Libertaire Bisontin » afin de lui remettre une convocation devant le tribunal correctionnel pour « injures et diffamation à l’encontre d’un représentant de l’État ».
Déroulement du procès.
Une vingtaine de personnes est présente en soutien dans la salle du tribunal. Après un rapide rappel des faits et des poursuites judiciaires par le président, celui-ci précise quand même que ce n’était pas « Le Libertaire Bisontin » qui était visé mais bien le ou les rédacteurs du journal « Séditions ». Faute d’avoir mieux, l’État se rabat sur ce qu’il a entre ses mains. Hormis le fait que la procureure Edwige Roux-Morizot (à l’initiative des poursuites) et les juges aient passé le temps à tenter de sauver la face de leur « Etat de droit » et de leur « République », à voler au secours de leur petit protégé de la préfecture (qui, parce qu’il signe chaque avis d’expulsion contre des gamins et leurs familles, est un homme « courageux ») et rappeler ses origines – famille immigrée, de « Hussard de la République », comme si ça déterminait un individu dans les choix qu’il fait plus tard – le pouvoir a surtout tenu à faire une leçon de citoyenneté à l’accusé, à le rappeler à l’ordre, à l’humilier. La fonction normale de tout tribunal. C’est bien sûr l’État qui est attaqué à travers le fait de cibler un de ses représentants, mais également sa politique migratoire, ses frontières et ses gardiens. En rappelant la publication de la photo de J-P Setbon dans l’article du journal « Séditions » (que l’on trouve bien sûr partout sur le net), la proc’ évoque le fait qu’un anonyme puisse être pris d’un désir de vengeance en s’en prenant à un responsable de la machine à expulser.
Bien que le passage incriminé de l’article « Il paraît que Setbon se balade souvent dans Besançon, et notamment dans le quartier Battant. Il ne reste plus qu’à l’empêcher de dormir sur ses deux oreilles… » ne soit en aucun cas une « menace de mort » (dans ce cas-là, comment pourrait-il être empêché de dormir?) comme juges et flics l’affirment, ce procès rappelle que les écrits peuvent parfois être tout aussi violents que certains actes, et que les deux font la paire, comme le disait un anarchiste d’une autre époque. La peur profonde du pouvoir réside notamment dans le fait que cette subversion contre l’ordre établi se propage.
Le délibéré du tribunal est fixé au 21 juin prochain.
La meilleure solidarité reste de poursuivre la lutte contre les frontières et la machine à expulser.
Rappelons que de nombreuses personnes passent en procès le 23 juin à Paris pour avoir, en guise de solidarité offensive avec les révoltés du CRA de Vincennes à partir de 2008, attaqué entreprises et institutions qui constituent des rouages de la machine à expulser et à enfermer. Renouons avec la solidarité révolutionnaire !